ZEROSECONDE.COM: Deplacement de la confiance (par Martin Lessard)

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Impacts du numérique sur la communication, notre société, nos vies.

Deplacement de la confiance

Les consommateurs semblent en avoir marre. La "crise" actuelle des mass-médias traditionnels découle de l’effritement d'une croyance culturelle : une information sur un événement ne s'altérait pas tout à fait dans sa transmission. Expliquons.

Pourquoi Bloguer dans un contexte d'affairesIl faut comprendre que la transmission elle-même de l'information doit être "invisible", selon cette croyance, afin de préserver "le sentiment qu'événement et information sont une et même chose" [1].

La télé use abondamment de cette croyance. La dernière mutation en cours insiste lourdement sur cette facette : la télé-réalité. Ce que vous voyez pourtant, dans ces télé-réalités, ce sont des réalités maquillées.

Objectif l'Une
La légitimité des institutions médiatiques traditionnelles a diminué à coups de suspicion permanente. Jouant sur le mot "objectif" les caméras de télévision ne donnent plus à voir le monde, mais un spectacle.

La Une des journaux populaires ne laisse place à aucun doute à ce sujet. La Une est là pour séduire.

Les barbares aux portes de Bernard Derome
Le pouvoir transactionnel de l'information se déplace depuis l'arrivée des blogs/vlog/podcast sur le terrain profane et acquiert (ou perd, c'est selon) son aura "majestueuse": tout le monde peut communiquer, tout le monde a le droit de divulguer sa version des faits. Les blogues ont permis à une multitude de gens d'exprimer leurs points de vues

Nous entrons semble-t-il dans une société où la vérité perçue ne peut plus se limiter à la capture directe par les instruments d’enregistrement d’institutions légitimantes, activités autrefois monopolistique des journalistes.

Il s'agit d'un déplacement d'acceptation de la crédibilité : on ne peut pas truquer 1000 images de 1000 sources différentes. Il semble désormais que des récits "incarnés", plus "humains" et qui dépassent les simples traces figées nous permettent d'expérimenter de façon multiple la réalité.

Influenceurs en vues
Ce transfert n'est pas nécessairement un gage de vérité[2]. Mais comme les règles du jeu sont en train de changer, il est normal de voir émerger de nouveaux influenceurs. Particulièrement dans la blogosphère.

Ces influenceurs qui transcendent parfois leur institution (Arpin, Lagacé et Pisani sont "indépendants" de leur 'journal') ou qui émergent comme des outsiders dans certaines niches (Leblanc, Asselin, Crouzet ou LeMeur), créent un espace nouveau où la subjectivité est admise et où le public en redemande : ces influenceurs ont un rayonnement moral et intellectuel, une autorité en tant que pouvoir social.

Maintenant, les blogueurs, jouant sur le mot "subjectif", donnent à voir un monde incarné dans une vision humaine, comme un sujet et non comme un consommateur.

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Pourquoi Bloguer dans un contexte d'affairesJ'explique comment "bloguer pour influencer" prend racine dans ce déplacement de la confiance chez les consommateurs dans le collectif "Pourquoi bloguer (dans un contexte d'affaires)" qui sortira bientôt. Il est actuellement en prévente et je me me ferai un plaisir de vous le dédicacer.


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[1] Weissberg, Jean-Louis, La crise fiduciaire des médias de masse, 2006, Site : Multitude Web,
[2] Lessard, Martin,Astroturfing : l'usurpation de représentativité, 2006, Site : Zéro Seconde
Photo Agoasi
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Lire aussi:
Vint Cerf, aka the godfather of the net, predicts the end of TV as we know it (Gardian, 27 août 2007)
Hubert Guillaud, La technologie va-t-elle sauver la télévision ? (Internet Actu, 30 novembre 2005)
Cyril Fievet, Télévision 2.0
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3 commentaires:

samedi, septembre 08, 2007 10:39:00 a.m. Anonyme a dit...

Bon, va falloir que je t'offre un drink au prochai Yulbiz. Notre amitié t'aveugle peut-être mais ça fais out de même plaisir...

dimanche, septembre 09, 2007 7:14:00 a.m. Meichelf a dit...

ce qui me semble important à souligner c'est que ces influenceurs construisent des savoirs avec l'ensemble de leur lecteurs et contributeurs...le lien est réellement interactif et constructif autour de ces réseaux actifs...c'est à mon sens un point important qui catalyse confiance et autorité !

dimanche, septembre 09, 2007 8:56:00 a.m. Martin Lessard a dit...

Florence, bon point. Le lien interactif et constructif compte pour beaucoup. Mais il arrive parfois, et je devrai un jour développer cette pensée, que la confiance est donnée sur d'autres bases, et la subjectivité et l'outil en font partie.

Je pense notamment à Loic Lemeur dont le lectorat est définitivement trop grand pour qu'il y ait une réelle "interaction et construction".

Tout au plus reçoit-il du "courrier des lecteurs" ouverts à tous : la quantité est telle qu'il ne peut se permettre de répondre à tous!.

Qu'il puisse avoir l'oreille attentive d'un tel immense public est un signe d'une demande (et non un pression de l'offre --ce qui est le cas des médias top-down) procède d'un besoin alternatif de compléter sa vision du monde sur un nouveau mode.

Je crois aussi que dès que les règles changent, de nouveaux acteurs se retrouvent favorisés et d'autres en mauvaise posture.

Quelque chose se passe dans la société en réseau qui me dit que les modalités de confiance et d'autorité sont en mutation et donc que la société aussi est en train de muter.

L'apparition, donc, oui, des réseaux actifs, interactifs et constructifs sont les premiers artéfacts. Bien vu.

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