ZEROSECONDE.COM: mai 2009 (par Martin Lessard)

ZEROSECONDE.COM

Impacts du numérique sur la communication, notre société, nos vies.

Publier maintenant, trier plus tard

L'autopublication induit de nouvelles stratégies de filtrage. Comme le dit Shirky, filtrer avant de publier ('filter-then-publish'), malgré ses clairs bénéfices, ne convient que pour un monde où sévit la rareté des information. Rareté par rapport au tsunami qui nous submerge aujourd'hui.

'Mass amateurization of publishing makes mass amateurization of filtering a forced move. Filter-then-publish, whatever its advantages, rested on a scarcity of media that is a thing of the past. The expansion of social media means that the only working system is publish-then-filter'
Clay Shirky, Here comes everybody, 2008

Les nouvelles stratégies qui se mettent en place le sont par les médias sociaux, via des systèmes de tri post publication ('publish-than-filter').

Je retombe sur cet extrait de Shirky en ce moment car j'écris un texte pour un des chapitres de Sébastien Paquet pour son cours sur les réseaux sociaux. L'extrait me fait penser à ce que j'avais écrit en 2005 (post before processing)

Parce que nous sommes entrée dans une ère où, grâce aux nouvelles technologies, la logique traditionnelle de publication selon l'offre et la demande fait place à un "post before processing".
"Post before processing"
Le "propriétaire" publie (post) une information sans se soucier de son problème d'identification du "public-cible" (à qui écrit-on?, comment adapter son niveau de langage?, qu'est-ce qui les intéresse?).

C'est au "destinataire" que revient le problème de discerner (process) parmi les divers "sources" d'information possible celle la plus appropriée selon ses besoins.

Inverser la problématique, c'est s'offrir le pouvoir de l'automatiser. Il sera toujours plus facile pour un internaute qui recherche une information d'en déterminer sa pertinence qu'un producteur de contenu de faire le tri lui-même.

On publie en premier, on voit ensuite comment traiter l'information: "post before processing".

(Sur Zéro Seconde Post before processing, 2005)
On voit maintenant partout dans la blogosphère et la twittosphère des "émetteurs" qui publient (post) une information sans se soucier aussi d'un "public-cible".

J'avais écrit un billet où je comparais Twitter à une possible application grandeur nature d'un concept militaire proposé au département de la défense américain qui est à la base du concept du 'publish-than-filter' (Twitter : power to the edge)

Le document militaire proche du Department of Defense américain explorait la capacité militaire de synchroniser dynamiquement ses actions de façon à augmenter la vitesse de commandement via un réseau robuste décentralisé. Plus précisément en disséminant l'information le plus rapidement possible en laissant le soin à la périphérie de juger de sa pertinence.

Notre réseau social est notre périphérie.

Texte à lire sur le sujet
Post before processing: La nouvelle logique de publication
Intox en stock : marrante démonstration à l'inverse que la presse centralisée n'est pas sans faute
Twitter : power to the edg: C'est au "destinataire" que revient le problème de discerner (to process) parmi les divers "chunk" d'information possibles ce qui répond à ses besoins.

Quand Google indexera-t-il nos têtes?

L'algorithme de Google pour enrayer sa fuite de cerveaux. C'est le titre de 20 minutes d'hier pour expliquer la dernière invention de Google: prévenir la défection des employés avant qu'eux-mêmes ne le sachent. Minority report? (via B-r-ent)

Face au départ de nombreux collaborateurs à "haut potentiel" Google s'est fendu d'un algorithme mathématique pour détecter qui voudrait partir avant même que cette personne ne s'en rende compte elle-même («une hémorragie de cerveaux qui pourrait nuire à sa capacité à long terme à se montrer compétitif»)

En examinant les promotions obtenues et l'historique des salaires, l'algorithme tente d'identifier qui parmi les employés de Google seraient sur le point de quitter la compagnie.

Le 20 minutes cite le WSJ ("Google Searches for Staffing Answers") qui interview Laszlo Bock, la tête des ressources humaines de Google qui dit chercher «à rentrer dans la tête des gens bien avant qu'ils ne sachent qu'ils pourraient vouloir partir» un jour.

if, if, if, l'algorithme de la bête
Je pense que cette idée part de bons principes pour les ressources humaines (prendre soin de ses employés) mais je suis horrifié que Google dise tout haut ce que tout le monde pense tout bas: Google lit dans nos têtes.

Quelle boule de cristal numérique?
1- un algorithme n'est pas un filtre de vérité, c'est un biais qui indique une façon de voir le monde (voir mon billet C'est l'algorithme qui décide)
2- il faudra toujours l'interprétation humaine pour qu'il y ait sens. Et on peut voir ce que l'on veut

À l'ère du web 2.0, ce n'est pas le fait que ses datas personnelles circulent qui cause un problème, c'est l'interprétation que l'autre en fait qui est dangereuse. On est toujours le "méchant" de quelqu'un d'autre...

"Personal data is the currency of Web 2.0"
Sur O'reilly radar justement, on signalait avant-hier les “25 Surprising Things Google Knows About You” .

Un de leurs blogueurs s'inquiétait à juste titre que les compagnies à qui on donne nos datas personnels ainsi sont en fait amoral, c'est à dire au-delà de la morale: la valeur aux actionnaires est tout ce qui compte. Il fait même une demande de protection pour avoir le droit à la vie privée adaptée au 21e siècle. (source Captivity of the Commons de Ross)

La vie privée est devenue une responsabilité, dit-il.

Que Google prétende ouvertement "lire dans nos têtes" ("get inside people's heads") évoque le tabou social ultime de la vie privée cher à l'homme moderne. Qu'en pensez-vous?

Restants de tabs du mardi matin

Petits liens du matin. Pour arriver en retard au boulot...

Passer du rapport de stats à la "business optimization"
Retour sur la journée Infopresse Web Analytics du mois dernier où était présent notamment Jim Sterne, président de la Web Analytics Association et fondateur de la série de conférences eMetrics Marketing Optimization Summit. Par Nicolas Cossette.

La place du Québec dans la mouvance Web 2.0? être en retard!
Entreprise 2.0, webcom, idéagoras ! Solutions pour rattrapage, selon Claude Malaison de Allard Hervieu Communication

Le "crash" de Google du 14 mai 2009
Une panne due à un acheminement du trafic via l'Asie a causé un énorme embouteillage. AccessOweb a déniché un graphique la chute de trafic. Impressionnant.

PDF La mutation inachevée de la sphère publique (Pierre Levy)
Une introduction à la "mutation contemporaine de la sphère publique sous l’effet de l’extension du cyberespace" (on dit web 2.0 pour les intimes). Lévy y voit un tremplin idéal pour la "délibération collective" via le web sémantique qu'il prédit arriver en 2015, permettant aux "intelligences collectives" d'être directement accessibles. 6 pages.

To tweet or not to tweet: 'We Need a Zone of Trust,'
Débat au NYTimes: peut-on transmettre le contenu de réunion interne sur Twitter? Une éthique de la place public...

Autres liens, au cas...
Tutoriels pour Yahoo Pipes en français par un bilbliblogueur

Strategy for Managing Followers on Twitter par ObjectiveMarketer

10 Ways to Change the World Through Social Media par Max Gladwell (Mashable)

What Is Google Squared? It Is How Google Will Crush Wolfram Alpha et une vidéo exclusive sur techcruch

et trois autres pour la route
Ten Twitter Mythconceptions
Over 200 social bookmarking services!
Over 380 Digg clones!

Crowdsourcing: mettre la foule à profit

J'ai donné une conférence hier sur le crowdsourcing au Webcom de Montréal. Vous trouverez le lien vers la présentation ici.

Le crowdsourcing qu'est-ce que c'est? C'est un terme inventé par Jeff Howe dans le Wired de juin 2006.
Outsourcing = sous-traitance à l’externe

Crowd = foule
donc
Crowdsourcing = sous-traitance à “la foule”

L’externalisation de la participation permet de puiser dans la longue traîne des talents (Pisani), ce qui s'appelle “La sagesse des foules” (Surowiecki) où un choix de groupe, en général, se révélerait meilleur, en moyenne, que celui d'un seul individu en tout temps. Ou plutôt, il émergerait des connaissances sur un état qu'un individu seul n'est pas toujours apte à connaître, tout seul, tout le temps.
Accès à la vidéo de la conférence


Un type d'usage du crowdsourcing
Dans ma présentation, j'illustre un type d'usage du crowdsourcing où groupe doit appartenir à une communauté d'intérêts (Seth Godin) et utilisé pour sélectionner, ou plutôt faire émerger, des éléments qu'un individu à l'interne n'a pas le temps, les connaissances ou les capacités de faire seul. L'individu en question ne fait que récupérer ce qui percole dans la communauté.

Le coût d'entrée pour gérer un groupe d'intérêt a beaucoup diminué (Clay Shirky). Toutes activités qui auparavant demandaient beaucoup de coordination se voient maintenant propulsées sur Internet.

Est-ce bon pour vous?
Pour savoir s'il l'on doit avoir recours au crowdsourcing pour son projet, il faut savoir répondre à ces deux questions:

- Comment les usagers peuvent ajouter de la valeur?
- Comment faire en sorte qu’ils ajoutent du data au projet (implicitement ou explicitement)?

Et si vous démarrez une communauté pour faire du crowdsourcing, dites vous que c'est vous qui êtes votre première communauté . Vous ne créez pas une communauté, vous accueillez les autres

Liens du lundi matin

Entre le croissant et le café, il y a bien quelques clics à faire avant de démarrer la semaine ;-)

Seth Godin et la tribu montréalaise

Seth et moi - Le blogue de Marie-Claude Ducas
Retour sur le passage de Seth Godin à Montréal et sa fameuse phrase assassine. Lire les commentaire pour plus de contexte et de piquant.

Seth Godin Lost his Montreal Tribe - Le blog d'Isabelle Chrun
Où Seth répond, dans les commentaires des autres.

Le monde de l'information
Fausse citation sur Wikipedia, journaux piégés - Le Monde (via Samia)
La demi-vie de twitter - Zéro Seconde
Les nouvelles sont éternelles - Zéro Seconde
Murdoch’s War on Free Web Content - Current_NEWS

À consulter
10 Web Sites That Will Matter in 2009 - IT world Canada
Academic Earth - Thousands of video lectures from the world's top scholars.
95 things I have learnt in 9 years of community building - Community Spark

La demi-vie de twitter

Nicolas Carr dans un billet avant-hier, The Fickle Twitterer, suggère que la montée fulgurante de Twitter (14 millions d'usagers) n'a d'égale que le nombre de gens qui abandonnent l'outil (60%). Avec un taux de rétention de 30 à 40%, Twitter montre ses limites avec une demi-vie plus courte encore que celle des blogues.

Essayer n'est donc pas l'adopter. On pourrait trouver intéressant dans d'autre domaine de retenir 30 % de sa cible, mais ici, après avoir fait le tour du monde, comme pour un feu de brousse, il n'y aura plus rien à brûler...

Carr cite les chiffres de Nielsen montrant que MySpace et Facebook avaient des taux de rétention deux fois plus élevés à la même période (étape d'expansion accélérée) et qu'il se stabilise aujourd'hui à 70%. (source)

Il termine en disant que si les chiffres de Nielsen sont justes et ne changent pas, Twitter deviendra la radio amateur du web 2.0 (c'est-à-dire un univers clos et réduit de gens qui soliloquent...)

Un peu abrupt comme déclaration. Je crois plutôt que les chiffres montrent que dans un univers (relativement) libre et (à peu près) sans contrainte, où tous peuvent devenir des producteurs de contenu, ce pouvoir n'est pas à la portée de tous.

Que ce soit pour des questions de temps ou d'intérêt, nous ne voulons pas tous être des médias...

La WebTV comme un cabaret d'antan

La semaine dernière, en donnant une formation à des producteurs télé sur les façons d'aborder la webTV, l'un d'entre eux, Barclay Fortin proposa une excellente métaphore pour expliquer la webTV aujourd'hui:
"(...) j’ai réalisé une chose: Internet est en train de ramener l’industrie du divertissement à l’époque d’avant les médias de masse. Lancer un site de webtélé comme Chez Jules, c’est un peu comme ouvrir un cabaret ou un théâtre burlesque à l’époque de Jacques Normand et d’Olivier Guimond. Le point commun, c’est le fractionnement de l’auditoire. À la télé, des millions de personnes voit le même «spectacle» au même moment. Sur Internet, par contre, il y a des centaines de «spectacles» à l’affiche et on va voir celui qu’on veut au moment où on veut."
(source Barclay Fortin C'est pas juste de la Télé)
Il ajoute que les "cabarets et les théâtres des années 30 et 40 étaient des entreprises modestes animés par des artisans passionnés qui essayaient tout simplement de gagner leur vie".

Il a décrit la meilleure impression que l'on peut avoir à vouloir faire de la webTV aujourd'hui...

Les mass-media ont été un certain temps une exception à l'échelle de l'histoire de l'humanité: une information pouvait être transmise à des millions de gens à la fois (relisons Wired juillet 2006 The Rise and Fall of the Hit ). Par les réseaux sociaux, l'information possède généralement une moins grande portée (exception faite des rumeurs et autres transmissions virales). On voit un certain retour à une ère du bouche à oreille (aussi rebaptisé buzz marketing pour être plus vendeur) où l'influence et la transmission se fait sur une petite échelle.

L'offre est exponentielle, mais notre attention est linéaire
Dans un court billet hier, Steve Rubel propose ni plus ni moins que The End of the Destination Web Era, la fin des "destinations web", ces lieux virtuels exponentiellement de plus en plus nombreux et qui compétitionnent avec notre attention limitée et fragmentée.

Il expose des chiffres hallucinants (source Nielsen Online), en mars dernier, un américain moyen:
  • n'a visité que 111 domaines différents
  • consulté qu'environ 2500 pages ,
  • avec un temps moyen de 56 secondes par pages.
  • les portails et les moteurs de recherche occupent 12 des 75 heures en ligne
  • les médias sociaux (Wikipedia, Facebook, YouTube) 4,5 heures par mois...
En bon stratégiste de relations publiques, il est convaincu qu'une mention dans un article est plus porteuse qu'une publicité. Une autre façon de dire que la référence par autorité cognitive sera la façon de trier l'information "crédible" du futur.

Une autorité cognitive est cet intermédiaire a qui l'on donne la crédibilité nécessaire de trier l'information pour nous (voir mon billet qui définit le sujet de l'autorité cognitive). Le filtrage par réseaux sociaux est une des stratégies émergentes pour survivre à la surabondance de l'information. L'ensemble de nos connexions trie les informations qui se rendent à nous.

Que ce soit un journaliste, un blogueur, un ami ou la famille, ils trient pour nous et nous font suivre l'information qu'ils pensent qui nous intéressera. C'est eux qui nous diront à quel cabaret se trouve le meilleur spectacle en ville...

Bye Bye Encarta, victime du tout en ligne

Le mois dernier, Microsoft a décidé de retirer Encarta, son encyclopédie numérique, des tablettes et en ligne (Annonce officielle; point de vue de ReadWriteWeb et du New York Times) dès la fin de cette année (via La feuille). Sommes-nous étonnés? On le devrait.

EncartaPlusieurs ont signalé la fin d'Encarta en pointant un coupable, Wikipedia (lire The Gardian). Encarta a été conçu à une époque où les projets encyclopédiques pouvaient se vendre plus de 1000$; le CD est aujourd'hui vendu moins de 25$US. Il est normal de penser qu'il est une autre victime de l'écroulement des prix dans l'économie de l'information.

En fait, ce qui est véritablement le plus étonnant, c'est qu'il n'ait pas déposé son bilan plus tôt: le véritable ennemi était le Web et Google, menaces présentes depuis 20 et 10 ans respectivement. Bien avant la montée fulgurante de Wikipedia.

Internet couplé avec le puissant moteur de recherche a créée la plus gigantesque source d'information multimédia relativement fiable avec une mise à jour dynamiquement imbattable sur la plupart des sujets d'intérêt commun. Le coup aurait dû être fatal bien plus tôt.

Alors, pourquoi fermer juste cette année?

Encarta vivait en fait dans les strates marginales de la planète non branchées. Certains marchés internationaux permettaient à Encarta de survivre (source New York Times). Des milliers d'ordinateurs "non en réseau" voulaient s'offrir une encyclopédie multimédia somme toute assez complète. Il aura fallu 15 ans pour saturer toutes ces poches de résistance au tout en ligne...

Le retrait d'Encarta par Microsoft sonne le glas d'un univers où il resterait des zones non connectées, "hors ligne"... Dernières brèches avant connexion complète...

Entrevue avec Seth Godin

J'ai rencontré Seth Godin il y a deux semaines lors de son passage à Montréal. Il était venu à Infopresse 360 pour parler des opportunités en temps de crise [présentation ici]. Voici (enfin) l'interview transcrit.

Seth GodinSon discours tournait autour de la puissance des "tribus": quand un changement majeur se fait sentir dans une industrie, il s'accompagne souvent de changement de règles, donc de transfert de pouvoir. Dans une économie d'interruption (publicitaires) en déclin, les marques entourées de "tribus" sauront s'en sortir.

J'ai eu la chance d'avoir un entretien d'un quart d'heure avec lui, voici le condensé de notre courte discussion.

Martin Lessard:
Où peuvent se trouver les tribus? Comment une telle communauté peut se mettre en place?

Seth Godin:
Robin Dunbar, un sociologiste, calcula un jour que nous sommes conçus pour ne pas pouvoir connecter plus de 150 relations. En anthropologie, on remarque les tribus ancestrales, au-delà de 150 membres se scindaient en sous-groupe pour former une nouvelle tribu. 150 semble être cette limite neurologique que nous nous pouvons supporter à entretenir des relations avec des gens à qui l'on fait confiance et que l'on aime.

Ce qu’Internet a fait c'est de prendre ce nombre et de permettre de le pousser à 1000 [le web offrant une extension à nos connecteurs cérébraux en quelque sorte]. Et du coup, il autorise de voir de nouvelles façons de penser et d'agir. En ayant personnellement un ami à Mumbai, lors des récents attentats terroristes, ma vision de l'événement change totalement. De la même façon quand le réchauffement planétaire menacera les côtes du monde entier, un ami de votre réseau sera éventuellement affecté. Cette expansion de notre réseau jouera un rôle sur notre côté tribal pour nous mettre en action.

Notes sur la question 1
[une intro sur le nombre de Dunbar [en] sur Wikipedia et l'article fondateur [en] ; ce nombre a été popularisé auprès du grand public par Galdwell dans son Tipping point ; la limite du réseau centré sur l'intimité semble par contre beaucoup plus basse (7); pour avoir un exemple du réseau en action autour de l'attentat de Bombay, voyez mon analyse du phénomène du microBlogage dans l'écosystème de l'information) ]

Martin Lessard:
Vous insistez pour dire qu'une tribu doit posséder un leader, pourquoi?

Seth Godin:
Si le nombre de connexions permises a augmenté, il faut aussi voir que le nombre d'opportunités pour les leaders augmente. L'expansion des connexions entrantes dans la communauté intéressera un leader qui pourra s'y consacrer, la nourrir, la faire grandir, et en faire lui donner encore plus d'opportunité d'investir en elle.

On peut se reconnaître partout dans le monde comme faisant partie d'une tribu. Une tribu peut se faire autour d'une idée et la question n'est pas comment la faire exister, mais pourquoi: par passion, ou par bénéfice personnel, ou parce que c'est notre description de tâche d'employé. Toutes les raisons sont bonnes. Il s'agit de savoir laquelle.

ML:
Mark Cubain [ le projet de financement Open Source Funding de Cubain ] and Richard Branson [le projet Pitch.tv] propose de rassembler des idéateurs pour pondre des idées sur lesquelles ils offrent d'investir. Sont-ils vraiment des leaders de tribus ou est-ce une simple foule? [une "crowd" ne se rentre pas dans la catégorie "tribe" selon Godin, notamment à cause de l'absence d'appartenance commune.]

SG:
Mark Cubain ne cherche pas à bâtir une tribu. Car il ne cherche pas les faire collaborer ensemble. Ce n'est qu'un moyen pour arriver à ses fins [plus d'info sur le blogue de Godin]. Richard Branson, lui, différemment, ne fabrique pas plus une tribu, mais plutôt une histoire. Il cherche plutôt à raconter une histoire à une audience plus large. Une tribu a ses "insiders" et ses "outsiders", ses membres se reconnaissent entre eux. Ici aucun des projets ne permet d'offrir de tels signes de reconnaissance. Ce qui n'enlève rien à ces brillantes initiatives, mais ce ne sont pas des tribus...

ML:
L'économie va mal. Côté social, on entend tous ces craquements. L'environnement montre des signes troublants. C'est le Jour de la Terre aujourd'hui [l'interview a été faite le 21 avril 2009] toute future idée ne devrait-il pas exclusivement être en fonction de bâtir des projets durables qui prennent en compte...le futur?

SG:
Le problème du jour de la Terre, d'une certaine façon, est que nous n'avons pas d'ennemi. Pour bouger, il faut un ennemi. Gandhi avait un ennemi, les forces colonisatrices. On doit se poser la question: que cherchons-nous à arrêter? Recycler quelques bouteilles aujourd'hui n'est pas la réponse. Dans quoi allons-nous investir pour que la chose fonctionne?

Un jour de réflexion n'est pas assez, il faut agir. Une idée brillante: Obama a proposé que chacun doit contribuer à rendre un service communautaire pour une heure, quelque part. Ce type d'engagement change les gens. Et ce n'est pas difficile.
J'ai ajouté un petit graphique dessiné à la volée sur les étapes qui définit un mouvement de tribu.

Tribe cycle
- Premièrement , il s'agit de créer une histoire (storytelling),
- De connecter la tribu (notamment en offrant une "place" pour se rencontrer),
- Puis de leader le mouvement (la tribu demande de se faire diriger),
- Pour ensuite accéder au changement.

Pour en savoir plus sur Godin et sa pensée
- Mon billet où je pointe vers plein de liens pertinents

Voici quelques vidéos
"All Marketers are Liars" - Seth Godin speaks at Google (48 minutes) 28 févr. 2006
Seth Godin at Gel 2006 (20:26) - 9 août 2006
TEDTalks Seth Godin: Sliced bread and other marketing delights (17 minutes) février 2003
Seth Godin at eBay Live 2008 (5 minutes) Juin 2008
(mise à jour 11 mai 2009) :
Seth Godin TEDTalks Tribes are what matters now Février 2009

Voici quelques liens
Site officiel : sethgodin.com
Son blogue : sethgodin.typepad.com

Voici quelques réactions à sa conférence et à la journée InfoPresse.
Fil twitter lors de la conférence
Adviso: Retour sur la journée Infopresse 360 : «Saisir les nouvelles opportunités d’affaires »
Patricia Tessier: Conférence Seth Godin
Normand Miron: Le Seth Godin Tribes Tour: un Mégashow God(in) Rock mémorable
(2 ajouts du 10 mai)
Isabelle Chrun Seth Godin Lost his Montreal Tribe
Marie-Claude Ducas Seth et moi

Voici d'autres entrevues que j'ai faites
Fred Cavazza (2007) : commentateur et spécialiste Internet. FredCavazza.net
Michael Geist (2007) : professeur en droit d’Internet et du e-commerce. MichaelGeist.ca
Daniel Kaplan (2008): délégué général de la Fing

Presse en ligne : comment présenter l'information

Une comparaison (non exhaustive) de la façon dont la presse en ligne (essentiellement américaine) structure ses nouvelles sur une page, élaborée par Drouillat, et débusquée par Martin Jacques, se trouve sur Slideshare. Elle intéressera les compagnies qui ont beaucoup de contenu et qui doivent refaire leur page d'accueil ou celle d'une presse en ligne. Elle fait 94 diapos. Une vraie mine pour s'inspirer.