Citation chirurgicale
Je rêve depuis longtemps de citer une page web de façon "chirurgicale", c'est à dire non pas seulement "citer" la page web (son url) mais bien exactement le passage en question. J'ai trouvé un moyen.
Par exemple dans un récent billet j'ai fait référence aux "demandeurs de connaissances" sur un billet de Mario Asselin. Si vous cliquez sur le lien, vous tombez sur son permalien.
Bien.
Sauf que Mario étant particulièrement en forme, vous aurez trois écrans de texte bien serrés à vous taper pour retrouver pourquoi je cite sa page sous le terme "demandeurs de connaissances".
Le titre de son billet ni fait ni référence au terme, ni ne décrit le concept. Il parle davantage des compétences pour la vie que peut développer un cyberportfolio pour ces "demandeurs de connaissances".
Ma citation aurait besoin d'être plus précisément retrouvée. Non pas que le texte ne soit pas intéressant (au contraire) mais parce que je cherche dans un premier temps à préciser que le terme "demandeurs de connaissances" et que ce terme doit s'entendre dans le sens évoqué dans le cadre du billet de Mario. Car pour bien me faire comprendre, j'aimerais pointer, je dirais même surligner, le passage cité (pour mes lecteurs et moi-même) afin d'offrir un contexte lors de la lecture ou de la validation de la source.
Hé bien, ceux qui se sont rendu à ce paragraphe seront peut-être heureux d'apprendre que j'ai trouvé un moyen de le faire (à moins que je ne sois le dernier des abrutis à avoir compris comment le faire). Je n'ai rien inventé, seulement utilisé autrement un outil existant... (Comme je vante les mérites de l'ouverture sur le réseau, il m'apparaissait normal de 'détourner' un outil existant pour répondre à mon besoin.)
Je peux maintenant surligner sans trop d'effort des passages entiers des liens que je propose pour le plus grand plaisir de mes lecteurs.
Je profite de la fonction cache de Google.
Il faut attendre premièrement que Google indexe la page. Puis vous cherchez la phrase (entre guillemets) qui correspond à votre citation.
Dans la page résultat de Google, à moins d'être malchanceux, vous trouvez votre lien. Cliquez sur le lien cache. Et voilà. Il ne cous reste plus qu'à faire un hyperlien vers cette cache
Par exemple si je fais référence à l'autorité cognitive, je ne tiens pas à ce que vous ayez à parcourir tout mon billet pour retrouver la définition. Je passe par la cache. En cliquant sur ce lien vous tombez sur la page en cache sur les serveurs de Google. L'avantage c'est que les mots clefs recherchés sont surlignés!
Je ne sais pas comment encore indiquer que le lien pointe vers la cache et non la page originale.
Voici une proposition:
"La définition de Wilson de l'autorité cognitive (version surlignée) comporte ..."
Dans la mesure du possible je vais tenter d'utiliser ma citation chirurgicale si le besoin se fait sentir. Ce n'est pas à tout épreuve, mais ça facilite grandement la "traçabilité" de l'information...
Mise à jour 3 juin:
Aurel propose une extension pour Firefox qui permet de faire des citations chirurgicales avec GreaseMonkey et le script Ahoy.
Hubert signale un serveur qui permet de faire des citations par paragraphes.
Croire/berner
Comment définir la crédibilité d'un site web, d'une page web ou d'un blog?
On sait qu'il s'agit d'une qualité que l'on attibue à un contenu et cette qualité est puisée à partir de multiples détails. Mais, essentiellement, deux caractéristiques pèsent davantage dans la perception de crédibilité : paraître digne de confiance et sembler être expert dans son domaine.
Pour paraître digne de confiance, il faut démontrer de saines intentions, être véridique et impartial. C'est une dimension morale de ce qui ce semble bien.
Pour paraître expert, il faut être bien informé, expérimenté et compétent. C'est la perception de la connaissance et des compétences qui est observé ici.
Je précise "paraître", pour l'instant, parce que je ne sais pas si on peut "savoir" ou même "qualifier" une information sur le web comme digne de confiance et experte (la falsification est toujours possible).
Trois situations permettent de favoriser positivement la perception de crédibilité d'une information en ligne.
- Dans une situation où l'utilisateur possède un grand besoin de trouver une information.
- Dans une situation où l'utilisateur n'a pas trouvé l'information autrement.
- Dans un domaine où l'utilisateur n'est particulièrement à l'aise.
Renversons la question :
quand l'internaute se fait-il berner par une information sur Internet?
Quand il est dans une situation de demandeur de connaissance, qu'il n'a pas trouvé (ou ne veut pas demander) son information auprès de son entourage, qu'il ne connaît pas le domaine dont il cherche des informations et qu'il n'est pas familier avec les outils.
Il me semble intéressant de se poser cette question ainsi car on pourrait penser qu'il s'agit de logique quand on cherche une autorité cognitive sur le web. Mais j'émets un doute. Vu la montée de Google comme "source d'information" (on le voit notamment pour les questions entourant la santé), on fait actuellement appel davantage à son intuition.
Cela ne veut pas dire que l'on se fait systématiquement berner sur Internet, mais il est est clair que l'on se trouve en position précaire quand on cherche à apprendre, par soi-même, sur le web. La question à se poser : quelles sont les façons de minimiser le risque?
Se penser comme un filtre
Saddam Hussein à moitié nu à la "une" du tabloïd britannique “The Sun” et du quotidien américain “New York Post”.Étrangement, depuis qu'on m'a fait découvrir les "memes", ces virus culturels qui se propagent dans nos sociétés (une rumeur, une idée, une mode), je me dis que notre système social possède des anticorps pour certains "memes" mais pas pour d'autres...
Voilà ! La sale besogne est faite !
Maintenant, on peut photographier et filmer à volonté la "une" de ses journaux. En prenant bien soin d’indiquer que ce sont eux qui portent l’odieux d’avoir publié ces photos...
Ensuite on dit : "Regardez, nous écrivons que c’est humiliant de montrer Saddam en photo...en montrant des photos de photos de lui à moitié nu"
Une carence d’éthique dans les médias autorise la course aux scoops, à l’audimat ou au gros tirage. Le scandale est la nouvelle qui se vend le mieux.
Il n’y a pas que les journaux jaunes qui finissent par jaunir...
Des règles du jeu semblent inscrites dans ces institutions mais ne sont pas dévoilées (on n'a pas vu Bill Clinton et Monika Lewinsky en petite tenue à ce que je sache). Composée d’individus, ces institutions construisent des thèmes d’attractions publiques propices à la reproduction de ces "memes" correspodant à nos fragilités d'humain (le 'social interest' par exemple et les chiens écrasés en particulier)
Un enjeu est le retour aux combats des cirques médiatisés (les chrétiens étant remplacés maintenant par de jeunes prétendants aux Stars académies et autre American idol). Tout cela pourrait engendrer une lassitude qui nous ferait dire qu'il n'y a rien à faire. Or, une évolution nouvelle peut être pensée et transformer nos médias.
La blogosphère peut permettre ce renouveau, en autant que chacun se pense non pas comme un relais mais bien comme un filtre.
Dites Bloc-note
La Commission générale de terminologie et de néologie (France) a publié au Journal officiel , vendredi 20 mai 2005, un avis établissant un nouveau terme pour supplanter le mot Blog.
Ainsi, "bloc-notes", que l'on pourra accepter sous sa forme abrégée "bloc", désignera "un site sur la Toile, souvent personnel, présentant en ordre chronologique de courts articles ou notes, généralement accompagnés de liens vers d'autres sites".
(Via Le Monde)
L'Office québécois de la langue française a déjà proposé en octobre 2000 le mot "Blogue" et les synonymes "carnet Web" et (beurk) "cybercarnet". Elle avait écarté "blog", "journal Web", "webjournal" et "joueb". Le terme francisé "blogue" a permis la création de plusieurs dérivés, dont bloguer, blogueur et blogosphère.
Pour Bloc? La bloc-notosphère? La blocosphère? Passe encore. Mais l'auteur d'un bloc-note, comment s'appelle-t-il? Pas facile, mais j'aime bien tout de même. Et vous?
Pointer du doigt
L'exemple de Michel donnerait raison aux 'Control Freak' derrière le projet touristique de Made in Montreal : si on laisse les gens faire tout ce qu'ils veulent, ils vont faire n'importe quoi.
Michel a découvert un site de la Floride (évidemment) qui utilise Google Map pour pointer du doigt des délinquants sexuels de l'État... "Et demain, ce sera quoi?" dit-il...
Nous faisons face à un comportement d'ostracisation sociale assez malsaine : utiliser Google Map pour pointer du doigt des personnes, de tagger virtuellement leur chômière, de jouer à la chasse aux sorcières numériques, de faire du Maccarthisme digital, de préparer des nuits de crystal électronique aux conséquences bien réelles...
Réfléchissons. Il est clair que l'ouverture de Google Map n'est pas en cause; il donne technologiquement des outils à ceux qui veulent pointer du doigt. C'est tout. Nous parlons ici d'un comportement sociale qui pré-existe à la technologie. Internet, depuis qu'il est passé dans le grand public, ne fait qu'être une révélateur de ce que la société, jusqu'à ses moindres pustules, est: tout le bien et le mal que nous, humains pouvons faire...
L'affichage sur Google Map n'est que l'équivalent cartographique d'une liste, car le projet controversé ne fait que recouper une base de données existantes sur les délinquants sexuelles avec celle des cartes routières de Google. La liste existait avant et sa disponibilité ne causait aucun problème. Mais mise ainsi en image, symboliquement, on passe de l'action de 'nommer' à l'action de 'pointer du doigt' quelqu'un.
La société, grâce à Internet, voit formellement maintenant un comportement qui était latent, caché, hypocrite. Par exemple, Dieu merci, après des années de farces racistes ou sexistes, on a fini par épingler ceux qui propageaient ces sornettes. Ici, nous aurons à passer par une zone de turbulence morale o'u nous devront trouver collectivement une façon de répondre à ce qui se fait - ou qui est rendu possible- sur Internet. Nous devrons rééquilibrer collectivement notre éthique pour exclure (ou inclure) ces comportments, de les bannir (ou les accepter) afin de retrouver une entente sociale acceptable pour la majorité.
Je déplore cette utilisation de Google Map, mais je dois admettre que c'est une utilisation découlant de l'ouverture technologqiue que je prône pourtant pour les sites web. C'est à un niveau social qu'il faut régler s'il y a abus ou non. Internet n'est pas mis à l'index parce qu'on y trouve de littérature haineuse ou de la pornographie infantile. Après ces horribles découvertes, formellement, au moins, maintenant on peut porter des accusations. C'est déjà ça de bien.
Collision des 'names spaces'
Qui n'est pas tombé sur ce groupe en recherchant de l'information sur les fils web, ou en s'abonnant à des news alerts sur le mot RSS?
The Rastriya Swayamsevak Sangh -- RSS or the National Association of Self-helpers, is a very large, voluntary organization focusing on development of the society based on Hindutwa -- the essence of Hinduism [in India].
RSS has been banned in India twice but has remained a strong and popular political force. Soon after Mahatma Gandhi's assasination, there were anti-RSS violence, as the rumours spread that the many of the conspirators were members of the RSS and Hindu Mahasabha. In February of 1948, the RSS was declared an unlawful organization and the ban continued over a year.
(source)
Ce groupe a trouvé une soudaine notoriété mondiale uniquement parce que son acronyme est identique à celui du RSS. Cet effet de hasard qui met des groupes ou des réalites au grand jour n'est pas nouveau. Le dernier triste exemple remonte au Tsunami du 26 décembre 2004 : le monde entier a découvert cette province indonésienne d'Aceh (Atjeh) en quasi guerre civile contre l'autorite centrale qui l'oppressait.
Mais cette fois, c'est par un effet réseau. Ou plus précisement par un effet des bases de donnees (des moteurs de recherche). Je ne crois pas me tromper que le RSS (de l'Inde) est le mouvement indien le plus connu des geeks et des blogueurs. Que leur acronyme ait été XYZ et jamais il n'aurait eu une telle notoriété. Dans un monde de la compétition du "temps-cerveau", ou pourrait dire que ça équivaut à une campagne de Relation Publique de plusieurs millions. Dans ce domaine, devenir "top-of-mind" vaut très cher. Pas en argent, en reconnaissance ! Le jour où le RSS fera un coup d'éclat, le travail de reconnaissance sera fait : "ah oui, c'est le groupe chose qui fait des trucs-machins en Inde". Demandez aux groupes et aux régions qui n'ont aucune attention médiatique comment ils auraient apprecié avoir cette chance.
Il faut s'attendre à ce que des groupes, volontairement ou non, utilise cet effet numerique pour se créer une renommée tranquillement. Avec le réseau, il y a collision (ou juxtaposition) des "name spaces". Il n'y a plus seulement l'actualité médiatique qui nous fera connaître de façon aléatoire le monde, les moteur de recherche aussi nous feront découvrir, par sérendipité, des réalites insoupconnées d'autres cultures...
Convertir le monde 15 personnes a la fois
(photo de Boris | À l'avant plan :Sylvain Carle )
Petit tour chez mes amis de l'ONF pour parler du nouveau modèle de communication (et vulgariser la trinité Blog-RSS-Agrégateur). Dans la salle une quizaine de personnes de l'ONF venu découvrir ce que se trame sur le web 2.0 (ou le web 3.0?) .Un bel exercise d'introduction aux phénomènes de réseau post-bulle.
Je présentais avec Patricia, Sylvain, Boris, Ed et Michel Dumais. Vraiment une belle gang.
Forget 15 minutes of fame.
In the future everyone will be famous for 15 people...
-Momus 1991
(Lu dans un commentaire de mrG ( teledyn ) sur un billet de Seb .)
A propos de la micro-popularité:
Citizen K : Famous In Your Own Lunchtime
Wired: The Long Tail
Foundcity
Foundcity : bookmarking your urban spaces. It allows everyone in a city to mark the interesting things they discover throughout the day to a dynamic, online map. (via Fred Cavazza)
C'est la "folksonomy rencontre Google map" : les tags utilisés sur Google Map pour marquer une ville. Chacun peut identifier un endroit sous le tag qu'il veut...
Par exemple : le tag Street.Art
Actuellement, seulement New York est couvert.
Cette fois, je vais encore retourner le fer dans la plaie : c'est pas dans madeinmtl.com que ça risque d'arriver ce genre d'idée géniale... Pourtant dans ce cas-ci, c'est bien une application touristique insouçonnée que le réseau a apporté. Malheureusement, tout le génie du site est enfermé derrière une (très) belle interface...
(voir mes deux billets précédents; madeinmtl devient ma tête de turc, on dirait)
Cheap gas map
Tiens! encore une autre application qui utilise Google Maps.
Mon précédent post parlait justement cette ouverture sur le web. Si quelqu'un a un exemple d'une utilisation similaire pour madeinmtl.com ("Made in Montréal"), "L'opérateur urbain" - le super de visite et tourisme sur Montréal-, qu'il me fasse signe.
Je réitère ici que leur Flash est proprement hallucinant mais quel dommage que le génie reste prisonnier de la bouteille. Je crois que ce site mourra de sa belle mort dès que l'on retirera le respirateur artificiel...
Si quelqu'un doit faire des sites de tourisme, s'il vous plaît, réserver des sous pour penser le site en fonction du réseau et non des maquettes à présenter au client... Je sais que souvent les mandats qui viennent de ces organismes font un appel d'offre sur le visuel seulement, que le 'concept' a été 'pensé' à l'interne, mais il faut leur rappeller ici que le réseau n'est pas une décharge publique de prospectus...
Ouvert sur le réseau
Pour un site d'un artiste il n'y a aucun problème, pour un site touristique c'est dramatiquement plus important.
Éric Baillargeon a mis à jour un billet récent où il liste ce qu'un site "ouvert" comme Google Maps peut faire : la liste des applications (dans ce genre-ci) et de bruit médiatique est impressionnante. De multiples programmeurs ont réutilisé Google Maps pour aller plus loin ou l'intégrer dans d'autres applications (Firefox par exemple). En ce en 3 mois! Les sites en flash gagnent des prix, ceux qui sont ouverts gagnent des parts de marché.
Libérez les informations, elles sont les meilleures embassadrices de votre site. Elles vont sillonner le web, se loger dans les engins de recherche, morceau par morceau. Ouvrez l'accès à vos informations, utilisez les standards d'échange. N'ayez pas peur. Vous décuplez ainsi la force du réseau en votre faveur et augmentez la notoriété de votre site...Soyez en réseau : interrelié, ouvert, distribué....
Peut-on motiver quelqu'un à écrire dans un blog?
Il s'agit donc de compétence en "argumentation" (construire sa pensée et la défendre), en "rédaction" (car, bien sûr, sur un blog il faut écrire) et en "communication" (techniques, style, flair et séduction).
Pour me faire comprendre, je dirais qu'il faut chaque fois remplacer le mot "blog" par "conversation". Du coup quand on cherche à implanter un carnet (en classe, en entreprise, pour soi-même, pour sa famille, ses amis, etc) on pourrait s'expliquer plus facilement son succès ou son échec. J'ai l'impression qu'il y a des pistes d'ordre psychologique ou sociale et que cela touche profondément un sujet désespérément vaste: la motivation personnelle.
Qu'est ce qui motive quelqu'un? Comment transmettre la motivation? j'aimerais bien le savoir...
Rémy Gauthier a tenté de faire utiliser les carnets par les étudiants de sa classe à l'Université. Son résultat semblait mitigé, à ce qu'il en dit. Il y avait comme un manque de motivation (malgré les points rattachés au projet dans le bulletin).
Pour ma part, ça me fait dire qu'éventuellement les carnets atteindront un plateau d'utilisateurs : ce n'est pas tout le monde qui a quelque chose à dire, ou qui veut le dire, ou qui veut le partager, qui aime utiliser cet outil pour le partager...
J'aimais bien ma métaphore Bmail qui consiste à résumer que le blog n'est un "courriel à tous", que finalement le destinataire ne s'inscrit pas dans le champs to:, ni le cc:, ni le bcc: mais bien comme un message à qui de droit...
Il faudra reconnaître que certains (peut-être beaucoup) préfèront s'en tenir au courriel, s'ils veulent communiquer. La blogosphère ne restera alors qu'une sous-partie de l'univers du email car je considère les billets des carnets (les posts des blogs) comme des lettres ouvertes, comme une correspondance épistolaire dont l'auteur assume immédiatement sa publication (et non à titre posthume ;-)
Le blog comme page web avec public
Le progéniteur d'un blog se préfigure un lecteur-modèle, par le choix d'une langue, d'un sujet, d'une voix. Il se crée un public par la répétition, le rendez-vous.
Par public, je précise, j'entends une construction a-priori de celle-ci. Pas des statistiques. Une page web a x visiteurs. Un blog a un public de y ou z personnes qui reviennent sur un site à la recherche du dernier ajout. (voir mon billet sur la différence entre Blogger et Géocities à ce propos)
Le blog est une page web qui possède un public
Cette définition a l'avantage d'inclure dans la famille des carnets, Jean-Pierre Cloutier, le grand-père des carnets (avec sa défunte Chronique de Cyberie). Elle met de côté les détails techniques (commentaires, backlink, permalien, etc) qui ne sont qu'une mécanisation de la fonction. La chronique de cyberie n'a aucun lien de parenté (du point de vue technique) avec les outils de blog d'aujourd'hui, mais elle est néanmoins un carnet, essentiellement, un web log...
En fait le blog n'est qu'un outil technologique, le "microphone réseau", qui permet au chroniqueur de diffuser sa chronique. A parler des "blogs", et il n'y a rien de mal à parler des "blogs", on laisse dans l'ombre les "chroniqueurs". Comme si on se serait émerveiller des "micros" au début du siècle ou des "caméras" ensuite, pour parler de la radio et de la télévision. Ces outils ne sont en fait que le vecteur d'un phénomène nouveau : les mass-medias.
En focusant sur les mass-médias on transcendre l'outil. On s'attarde sur ce qui est la véritable rupture.
La rupture
Les blogs ont apporté cette rupture. Cette rupture, c'est la société des chroniqueurs dont j'avais parlé en début d'année. Le grand public peut espérer atteindre la masse. La technologie permet l'amplification de la sphère privée (ou du moins les réflexions de la sphère privée) sur la place public.
Le chroniqueur sur un blog, sans l'intervention d'une autorité, commente l'époque, un fait, un objet de curiosité. Il crée son public (ou sinon il reste éternellement solitaire) et il n'a pas l'obligation d'écrire sur une base régulière ni sur des sujets .
Ils sont dans la même famille que les chroniqueurs des mass-medias. Mais souvent ils ne sont pas payé pour le faire, ni ne sont obligé d'écrire sur une base régulière ni sur des sujets particuliers. Cette liberté offre un terrain d'étude très fertile - une nouvelle culture de diffusion des idées se construit.
Les chroniqueurs de la vieille économie
La création d'un public sur la simple base de la qualité de ses articles relève du tour de force. Les chroniqueurs des mass-médias bénéficient de l'apport de l'institution - ce qui ne leur enlève rien, mais leur portée s'en trouve décuplée.
Le prochain défi pour les mass-médias, c'est de renouveller le genre et leur parc de vieux chroniqueurs sclérosés : véritables bagnards à perpétuité, comdamnés à commenter l'actualité, à casser du sucre sur le bord de la route, les mains écorchées sur leur clavier-masse, les pieds enchaînés à leur hypothèque de chalet et prisonniers de leur train de vie alimenté par le salaire que leurs verse l'institution.
Les chroniqueurs sur Internet ont réussi transformer le canal en média. Ils arrivent avec leur fraîcheur et le système fait percoler le meilleur vers le haut. Skyblog n'est pas un site pour boutonneux, c'est le prochain modèle d'institution-média.
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16 mai 2005:
Je viens de tomber sur un excellent billet d'Alain Giffard sur le blog, comme objet technique distinct, où il parle des effets de l’ordre chronologique inversé et de la mise à jour qui oriente le carnet vers l'idée journal (mais je ne suis pas sûr s'il l'entend comme un média avec public). Un outil influence toujours l'écriture, le blog n'y échappe pas.
Il écrira aussi dans la même veine sur le Skyblog que je mentionne (je suis curieux de savoir ce qu'il dira). Les services web aux utilisateurs contenant des ensembles de fonctionnalités simples: mise en page, traitement de texte, base de données, statistiques, hébergement, fil web et aggrégation font partie de ce renouveau sur Internet.
Alain décrit aussi l'ordre inversée comme induisant une importance sur le dernier billet publié. Or, et moi-même je le fais, il m'arrive de mettre à jour un billet quelques jours après. Mais rien n'indique ce changement dans la mise ne page du blog : seuls peut-être certains aggrégateurs, en autant que le fil rss le collecte encore, repère ce type de modification.
Mais j'imagine qu'ici on rentre sur le terrtoire du wiki...
Prendre le temps de formuler un problème
"[N]ous intervenons avec la conviction que la personne qui prend le temps de formuler un problème n'est jamais seul à le vivre. Le fait de prendre le temps de mettre en mots ce qui nous cause problème est déjà, en soi, un gain, mais notre plaidoyer est à l'effet que quelqu'un quelque part, travaille probablement sur les mêmes enjeux et peut, de ce fait, apporter une contribution substantielle au cheminement de celui qui a formulé le problème au départ..."Le processus rédactionnel contribue au développement de la compréhension. À cela s'ajoute que l'écriture sur le web permet le partage. Le carnet représente un excellent outil pour sa simplicité d'utilisation. Mais l'enjeu n'est pas technique mais humain : il s'agit ici de partager et de s'ouvrir aux autres. Il s'agit d'un jeu où l'on donne et où l'on reçoit.
Cité sur le carnet de Mario Asselin (Tout de Go).
Blog versus Geocities
Une différence furtive? Pourtant les blogs sont comme des pages personnelles, mais gérées par un gestionnaire de contenu. Les pages personnelles sont commes des blogs, mais sans date et sans commentaire. Et les deux sont maintenus par des individues qui écrivent sur divers sujet.
Alors? Comment expliquer l'emballement pour des univers de contenu créé dans Blogger, Joueb, radio.weblog, monblog, etc, alors qu'il y a bientôt dix ans qu'existent des centaines de milliers de sites personnnelles sur Geocities. On donne toujours les définitions techniques du blog pour expliquer la nuance. Mais l'âme ne se réduit pas à une formule chimique.
Pourquoi savons-nous intuitivement que l'arrivée des blogs affiche nettement une différence avec l'avènement des pages personnelles? Rappellez-vous votre engouement lors de l'apparition des premières pages en HTML 1.0. On sentait tous que quelque chose de nouveau se développait.
Et puis notre espoir s'est estompé. Bien sûr les requins de la bulle y étaient pour quelque chose. Mais pas seulement. Le web grand public ne s'enlisait pas seulement parce que les grands portails étouffaient le web. Les pages personnelles ne fonctionnaient pas. Tout simplement. Les pages personnelles du grand public, sauf exception, apparaissaient autour du résultat numéro 150 000 dans Google, loin derrière les sites commerciaux.
Puis arriva les blogs. Les blogs et le RSS. Les blog, le RSS, les aggrégateurs. Les pages personnelles étaient revenues, oh déformées par le gestionnaire de contenu, bien sûr. Les pages d'accueil se sont mis à s'allonger, au grand dam de Jakob Nielsen, la page web n'avait plus "un" sujet mais "plusieurs" sujets. Oh crime de lèse-ergonome! Puis les commentaires sont venus rendre davantage confu l'identité de l'émetteur. Qui parle? Où commence la discussion? quand est-ce qu'elle se termine?
Les blogs, à n'en pas douter, étaient différents. Pas seulement un "forum à une personne". Pas seulement une "page personnelle en ordre chronologique". Quelque chose nous disait que nous n'étions plus au Kansas. Et on l'a tous perçu.
Les blogs ne relève pas de la mode au premier degré, les blogs avec ce vocable ou un autre s'incrustera, car les blogs ne sont ni plus ni moins que le web métamorphosé en outil de communication.
Quoi, ce ne l'était pas avant? Pour le grand public, non.
Géocities et les autres pages personnelles? Pour l'essentiel, c'est un formidable amas d'information. En ce sens le web ne représente qu'une extension -considérable- de l'espace de l'information normative et fonctionnelle. L'extraordinaire volume d'information que l'on trouve sur le web cache en fait sa propre banalité : s'il y a déluge informationnelle, si l'océan web se rempli de façon diluvienne, c'est qu'il y a bien quelque part des vannes qui l'on alimenté. Cette incommensurable masse d'information est moins révolutionnaire que son accès. Cette information transigeait déjà, impalpable, sur d'autres réseaux (téléphone, journaux de quartier, etc) à travers la planète. Elle ne fait qu'être formellement "visible".
Mais si je diffuse de l'information, fais-je de la communication? Pour y répondre, on doit se poser la question : qu'est ce qu'un média?
Est-ce qu'Internet est un média? Un canal, certes. Mais y a-t-il une communication de type médiatique sur le web?
La communication, il me semble, doit prendre en compte l'émetteur, le message et le récepteur. Et ces trois points doivent exister dans un espace contingent. L'émetteur doit possèder en commun avec le récepteur un code, des règles, des définitions pour produire le message. Autrement dit, il ne peut y avoir de médias sans représentation d'un public, sans intentionalité.
Voilà la caratéristique fondamentale d'un blog par rapport à une page personnelle. Avec une page personnelle, avec Geocities, nous sommes de l'ordre de la diffusion, de la capacité de diffusion sans réflexion a priori sur le récepteur. Un peu comme la différence entre un livre et une revue. Avec les blogs, nous sommes de l'ordre de la construction d'un public, d'un rapport entre un émetteur et des récepteurs.
Cela entraîne nécessairement une vision du rapport entre l'échelle personnelle et l'échelle de la communauté, qui inclut le choix de langue, de valeurs et de références à partager. Donc un rapport au temps, car une communauté de valeur ne se construit pas du jour au lendemain (demandez à tous ceux qui tentent de démarrer des forums, des wikis ou des sites, souvent ils se heurtent à une ignorance ingrate qui tôt ou tard aura raison des meilleurs ardeurs).
Le blog est le premier média grand public (par lui et pour lui) où une certaine réflexion sur ce que peut être la demande et le public, comme les mass médias se les posent, est un choix conscient.
Cette différence est essentiel pour comprendre le phénomène émergent. L'avenir du réseau n'est pas comme nous l'ont fait croire les spéculateurs de la bulle, un canal d'information marchande, du commerce électronique à l'échelle mondiale, de la rationalité technique de la transmission de data. L'expression et la communication reprennent maintenant leurs droits.
Les blogs, à l'opposée d'une page personnelle, et malgré toutes les caractéristiques techniques que l'on peut lui donner, se définit par sa "représentation de son public". Il le construit. Sans public, une page web n'est qu'une information, aussi lue soit-elle. Et, oui, un blog d'une communuaté X n'est que de l'information (ou du bruit) pour une communauté Y.
Le rêve d'un lectorat mondial n'existera pas car il n'y a pas de public mondial. Chaque bulles, plus ou moins grandes forment une écumes à l'échelle universelle. La globalisation permettra seulement certaines bulles de prendre de l'expansion, mais aucune n'englogera la planète. Regardez, vous avez accès à tout, mais vous voilà à lire ma bulle locale. Le blog permet le retour au public local. On en reparlera.