«Today I had a stark realisation: I no longer depend on Google to find stuff. I still use it to locate things: e.g. “find me the Wikipedia page on Ted Kennedy’s acquatic activities”. But I rarely - if ever - use it to find businesses, places to visit, interesting blogs, etc.»"Je ne dépends plus de Google pour trouver de nouvelles choses" dit-il en substance. Google est toujours utilisé, comme assistance à la recherche, trouver ce que l'on cherche (une page Wikipédia, par exemple) mais les réseaux sociaux servent à trouver des choses, des recommandations, des suggestions, des découvertes... (ex. Twitter, Praized, Facebook, Friendfeeds, Linkedin, Viadeo, etc)
In Google we trust?
Il pointe quelque chose d'intéressant: les réseaux sociaux sont basés sur la confiance ("trust"). Ce que n'a pas Google, dit-il.
Il exagère un peu, mais sur le fond, on peut dire qu'avec la montée en puissance des professionnels du rayonnement web, on peut se demander si la pertinence est toujours au rendez-vous...
Je dirais pour être plus juste, Google est plutôt un outil de popularité. Les réseaux sociaux tablent eux vraiment sur la confiance. Voilà une nuance fort pratique lorsqu'il s'agit d'expliquer la valeur stratégique du web 2.0.
La montée de réseaux sociaux
Le genre de discours que porte Cambell rejoint les échos qui grandissent depuis la montée des réseaux sociaux depuis quelque temps. Son mérite est de le formuler d'une façon percutante et libératrice ("nous ne sommes plus dépendants de Google") et en ce sens il rejoint mon point fait hier dans le billet Les couloirs numériques, où je présente Twitter comme outil de sérendipité professionnel.
Mais Cambell s'arrête en chemin -- il fait une conclusion typique de la blogosphère anglophone très portée sur le fonctionnel et l'impératif ("if your brand is not social then it doesn’t exist"). L'ouverture qu'il a créée mérite que l'on ferme la parenthèse pour lui, pour notre plus grand bonheur cognitif.
Descendre du piédestal
Voilà ce qui se passe : Google est en passe de devenir ce qu'il a toujours été : un simple moteur de recherche, un outil pour trouver quelque chose que l'on cherche. Jusqu'à tout récemment son monopole de succès le rendait maître des lieux. Il représentait par métonymie l'Internet au complet.
Ce que Cambell dit, c'est que la sérendipité («fortuité» selon le Grand Dictionnaire) n'est plus une exclusivité de Google. «Fait de trouver quelque chose alors même qu'on recherche autre chose» se fait en butinant sur les réseaux sociaux maintenant. Mais qu'est-ce que chercher?
IR
Olivier Ertzscheid et Gabriel Gallezot, dans Chercher faux et trouver juste, serendipité et recherche d’information (PDF) expliqué qu'il y avait un sens double à "rechercher".
- Il y a « rechercher » de la recherche d’information (Information Retrieval en anglais, IR)
- Et il y a le « rechercher » de l’épistémé, la recherche (Research en anglais).
Bon, ne vous sauvez pas parce que j'ai employé "épistémé": "recherche" est trop ambigu, alors je garde le terme académique.
Pour l’IR, Google est un outil du traitement de l’information sur un corpus documentaire.
Pour l’épistémé, le but est de découvrir, de produire de nouvelles connaissances.
Vous êtes comme M.Jourdain et vous faites de l'épistémé sans le savoir à chaque fois que vous découvrez quelque chose sur les réseaux sociaux (d'ailleurs comment avez-vous "découvert" ce billet?)
Les trois recherches
Ertzscheid et Gallezot résument les 3 « états initiaux » de l'IR (Information Retrieval / recherche d’information).
1- [Je sais] [ce que je cherche] . On fait alors des requêtes (Querying). C'est l'usage que Cambell semble vouloir faire de Google quand il cherche une page Wikipédia sur un sujet.Google nous a offert pendant plusieurs années ces trois types de recherche. Ce qui a été dit ici, c'est que le troisième type n'est plus l'apanage de Google, qu'il a perdu (définitivement?) son emprise sur ce secteur.
2- [Je ne sais pas] [ce que je cherche]. On procède par exploration (Searching), induction et abduction (avec moi vous avez des mots qui comptent triple pour le Scrabble). C'est le type de découverte que vous faites en librairie en repartant avec le livre à côté de celui que vous recherchiez. La structure de l'endroit ou du classement favorise ou non la sérendipité. Un BarCamp permet ce type de découverte.
3- [Je sais] [que je ne sais pas ce que je cherche]. Ici, nous sommes en mode d'apprentissage (Learning). C'est l'état dans lequel vous êtes quand vous entrez dans un réseau social. Vous pourriez autant trouver la référence au billet de Cambell que le fait que votre ami mange un sandwich...
Quand on dit que ne sommes plus dépendant de Google, c'est affirmer que l’influence de la sérendipité en matière de construction de connaissances ne repose plus dans les mains monopolistiques du géant de Mountain View.
Les réseaux sociaux sont nos moteurs de confiance et carbure à notre saine curiosité. Ils répondent à ce besoin de confort communautaire de construction de la connaissance...