ZEROSECONDE.COM: 2005 (par Martin Lessard)

ZEROSECONDE.COM

Impacts du numérique sur la communication, notre société, nos vies.

23:59:60

Seconde intercalaireCeux qui ont la chance de faire le décompte du nouvel an sur le méridien de Greenwich devront compter une seconde de plus: 5,4,3,2,1,1,0 !

Une seconde intercalaire est un saut de seconde pour ajuster une seconde du temps universel coordonné (UTC) pour qu'il reste à moins de 0,9 seconde du temps universel (UT) défini par l'orientation de la Terre. (voir wikipedia:seconde_interaclaire).

Cette année une seconde intercalaire sera rajoutée le 31 décembre. Pour en savoir plus

Ce soir, à minuit en temps universel (Greenwich) ou 19h00 (heure de Montréal car la seconde est ajoutée globalement, d'un coup) la seconde suivant 23:59:59 sera marquée 23:59:60 qui elle même sera suivie de 00:00:00 en date du lendemain.

Donc, aujourd'hui, 31 décembre 2005, c'est une journée de 86401 secondes au lieu des 86400 habituelles.

(source de l'image)

Catégorie reloaded

Il semble y avoir une corrélation entre la longueur d'un billet et le nombre de commentaires rattachés, remarque Laurent Gloaguen suite à mon billet d'hier sur les "catégories" de blogs...

"Intuitivement, plus un article est long, moins de lecteurs prennent le temps de le lire au complet (...) un article long met plus de pression sur le lecteur, qui estimerait que s'il doit commenter alors il serait obligé de développer sa réponse en un temps proportionnellement équivalent au temps que l'auteur aurait mis à rédiger son article. D'où découragement." précise Houssein Ben-Ameur.

Houssein a alors voulu vérifier empiriquement son hypothèse pour son Hou-Hou blog.

Hou-Hou Blog : ratio Billet-Commentaire

(graphique original tirée de Hou-Hou Blog)

Pour Houssein la conclusion est : "la taille optimale des articles sur mon blog se situe entre 3000 et 4000 caractères. Ces articles sont susceptibles de recueillir le maximum de commentaires."

Il existe donc une corrélation entre la longueur d'un billet et le nombre de commentaires laissés, mais pas nécessairement que les billets les plus courts en ont davantage (il faudrait augmenter l'échantillonnage pour vérifier ça).

Mais je crois que l'on peut affirmer sans trop se tromper que chaque blog possède son propre plateau, une taille optimale du billet, qui attire un maximum de commentaires.

Il faut donc que je revois la notion de catégorie dont je parlais hier à la lumière des commentaires et des billets à ce propos. Le ratio du rapport billets/commentaires commentaires/billet (merci Marc) me semble une bonne façon de mieux distribuer les blogs en écrivant seulement le ratio...

Embrun serait de catégorie +5.6
Hou-Hou Blog serait de catégorie +4.7
Alex Lauzon serait de catégorie +4.4
Tim Berner- Lee serait, lui ;-), de catégorie +227.5

Quelqu'un avec un taux négatif inférieur à 1 (merci Houssein) aurait plus de billets que de commentaires...

Mmm. Quel plaisir de réintroduire de la compétition dans la blogosphère ;-)

Mais le plateau de la taille idéale du billet pour recevoir nombre maximal de commentaires me semble une donnée plus intéressante à développer, car elle permet de mieux comparer les blogs similaires...

Tim Berners-Lee ouvre son blog

Tim Berners-Lee (l'inventeur du web) a ouvert son propre blog: "So I have a blog" est son premier post et il a reçu 455 commentaires d'un coup.

Commentaires qu'il a fermé aussitôt pour éviter de crouler sous le poids des "remerciements". C'est qu'il est resté humble :

"I just played my part. I built on the work of others -- the Internet, invented 20 years before the web, by Vint Cerf and Bob Kahn and colleagues, for example, and hypertext, a word coined by Ted Nelson for an idea of links which was already implemented in many non-networked systems. I just put these technologies together.

(...) So thanks for all the support, no need for more general 'thank you' comments! "

L'avalanche de commentaires me fait dire que l'on peut classer les blogueurs en 3 catégories:

A. ceux qui ont un nombre de billet inférieur au nombre de commentaire
(billets<commentaires)
B. ceux qui ont un nombre de billet sensiblement égale au nombre de commentaire
(billets=commentaires)
C. ceux qui ont un nombre de billet supérieur au nombre de commentaire
(billets>commentaires)


Tim Berners-Lee et tous les blogueurs vedettes sont sans aucun doute dans la catégorie A.

La majorité des blogueurs sont dans les catégories B ou C.

La catégorie A, visiblement, entretient des similitudes avec le forum où souvent les commentateurs se mettent à se répondre les uns les autres, particulièrement si le nombre de commentaires excède par des facteurs de 3 , 7 ou 10 le nombre de billet (pensons à Boing Boing).

La catégorie B doit être un plateau que plusieurs blogueurs recherchent afin de possèder le souffle salvateur pour continuer à entretenir la flamme.

La catégorie C est l'apanage des blogues qui n'ont pas encore trouvé leur "voie" auprès d'un public. Ou que leur "voix" n'a pas encore été ajusté pour susciter la "conversation"...

(maj: voir aussi le billet suivant sur le même thème)

Internet est un amplificateur de phénomène

Internet est un amplificateur de phénomène"Internet risque d’amplifier certaines tendances individualistes. La tendance à faire des choses de chez soi, séparé physiquement des autres. Internet, c’est tout faire, mais chez soi. La technique, c’est ça, jusqu’au fantasme de la sexualité.

Si notre société se replie de plus en plus sur son individualisme, Internet sera l’amplificateur de ce phénomène. Si la société maintient la diversité des rapports, des mouvements collectifs, Internet sera un mode de possibilité pour cela aussi.
"

C'était Philippe Breton en 1996 (oui, oui 1996) (via Emmanuel Parody). Internet est un amplificateur de phénomène, pas un créateur de phénomène.

Philippe Breton est chercheur au CNRS et l'auteur de nombreux livres sur la communication dont le célèbre Explosion de la communication avec Serge Proulx.

Distinction entre information et connaissance

"[...] je [Philippe Breton] propose de faire une distinction entre information et connaissance non pour les opposer mais pour retrouver ce que l’on a un peu perdu en France, l’objectivité de l’information.

On a besoin de l’information mais la connaissance, c’est autre chose, dotée de propriétés singulières.

L’information est détachable, transportable facilement. La connaissance n’est rien tant qu’elle n’a rien changé chez celui qui la porte, c’est ce qui vous transforme. La connaissance relève d’un désir et plus d’une médiation humaine là où l’information a un auditoire universel.

Accès à l'information

Si je conçois bien mon information un Chinois de la campagne peut se l’approprier. Ma critique porte sur le discours qui dit : « en accédant aux banques de données vous aurez accès au savoir ». En accédant aux banques de données, on a accès à de l’information et je trouve ça précieux.

Dans la connaissance il y a quelque chose de l’ordre de la transmission individuelle, de l’acte intérieur, d’un certain rapport à l’ignorance. Il y a un rapport paradoxal à l’ignorance, il faut à la fois l’accepter et la refuser. C’est ce qui nous donne le désir de savoir et que l’on n’a pas avec l’information.

L’information il faut l’avoir, c’est un domaine toujours positif. Internet me donne accès à la connaissance lorsque je discute avec un collègue. Internet est un outil supplémentaire pour transporter la parole.

Je me refuse à dire qu’Internet va permettre de résoudre l’inégalité d’accès aux connaissances parce que cela donne accès aux banques de données et à l’information. Il y a escroquerie intellectuelle.

Accès à la connaissance

On ne résoudra pas les problèmes d’inégalité scolaire en branchant les jeunes sur Internet. Il va se passer ce qui c’est toujours passé, ceux qui ont un désir de connaissances, ceux qui sont soutenus chez eux vont profiter très largement de cet outil formidable. Ceux qui sont coincés chez eux et qui ont un rapport fermé à la connaissance, on pourrait les mettre devant la connaissance entière du monde cela ne changera rien."

Source (les intertitres et les sauts de paragraphes sont de moi)
Mediametrie montrait récemment que la blogosphère Française était peuplée à 82% de "jeunes" de 24 ans et moins. L'appropriation de l'outil ne change pas la personne. c'est utilisation de l'outil qui est changé selon la personne. À partir de là, ce n'est pas étonnant qu'il existe une "skyblogshère".

Le phénomène des blogs en cours ne serait pas une révolution, une coupure, mais une appropriation en masse d'un nouvel outil de communication. Le vecteur porteur sous-jacent serait déjà présent dans la société: les gens veulent communiquer. Ce qu'ils communiquent est autre chose (voir le commentaire d'Aymeric pour un de mes précédents billets). Chacun commente ce qu'il veut du spectacle du monde...

Je crois que si révolution il y a, c'est seulement si cette appropriation en masse de l'outil fera basculer les équilibres existants par la prise de parole de gens qui n'avaient pas voix au chapitre. "L'exercice de la parole est la matrice de la démocratie" disait Breton. Pourrions-nous aussi transmettre un désir de connaissance ?...

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Autres liens pour découvrir Philippe Breton sur le web (rien de très récent par contre):

Entretien avec Philippe Breton de Peter Szendy dans Résonance n° 10, mai 1996, sur le serveur Ircam du centre Pompidou.

Ph. Breton, "Individualisme et démocratie : une origine commune ?", dans Regards n° 44, mars 1999

Ph. Breton, "Internet : village planétaire ou tour de Babel ?", conférence à l'Institut d'informatique, Namur, Belgique, février 1996

Ph. Breton, "Nous devons laïciser internet", dans Le Monde daté du 29 novembre 2000

Ph. Breton, "Le culte d'Internet", dans Le Monde diplomatique, octobre 2000 et un commentaire de Eric Dupin, journaliste à «Libération». (English version available here: Wired to the counterculture)

Ph. Breton, Les dérives d’internet, chronique publiée dans La Marseillaise du jeudi 29 mars 2001.

Compte rendu de La parole manipulée, de Philippe Breton, Editions La découverte / Essais, 1997

Internet constitue potentiellement une menace pour le lien social sur RU3.org

Regards sur la société de l'information (1996) Interviews de Philippe Breton, Joël de Rosney, Jacques Neirynck, Pierre Lévy, et Alain Touraine.

Le philosophe et le sociologue croisent le fer, Philippe Breton et Pierre Lévy, Web Net Museum 2001 (d'où est tiré aussi l'image en haut de mon billet)

Perfil biográfico en espanol

La blogosphère nue

Le tiers de la blogosphère Française, selon Mediametrie, serait composée de jeunes âgés entre 11 et 15 ans (35%). (voir mon précédent billet)

82% des bloggueurs n'auraient même pas 25 ans. 8% seulement ont au dessus de 35 ans.

La blogosphère Française ne serait qu'une immense cours d'école où on assisterait à la récré en direct par RSS? L'immense majorité des blogs sur skyblog (la cours de récré) n'aurait qu'un lecteur en moyenne. La blogosphère transige majoritairement des photos-portables, des mp3 et des borborygmes d'ados codés en sms...



Une certaine euphorie se dégonfle.

Vraiment? Non.

Disons que l'inflation des chiffres se dégonfle. La suprématie du nombre n'est qu'un vecteur quantitatif. Si on devait juger le téléphone à l'usage que l'on en fait, aucune entreprise, aucune personne sérieuse ne l'utiliserait : je plains les espions que Bush a mandatés pour taper les lignes d'écoute du monde ordinaire.

C'est le vecteur qualitatif qu'il faut évaluer. N'oublions pas que ça donne tout de même 400 000 blogs de "vieux". Il doit bien y avoir de la qualité là-dedans... (et même parmi les "jeunes", aussi*).

La blogosphère n'est pas un média à 2 000 000 canaux. C'est un percolateur. La percolation, via le RSS, le trackback, les liens pointeurs, permet de faire remonter le meilleur.

Il faut relire "Comment le carnet stimule la qualité" (chapitre 3 de La cognitique personnelle en ligne et son utilisation en recherche de Sébastien Paquet).

"Au fil de leurs lectures, les carnetiers sélectionnent avec soin l'objet de leurs hyperliens et choisissent inévitablement les plus intéressants. Les textes qui ont été le plus souvent référencés obtiennent bien sûr plus de visibilité. Mais le phénomène est amplifié par les moteurs de recherche tels que Google, qui classe les pages Web selon le nombre de pages qui pointent vers elles. En conséquence, lorsque l'internaute lance une recherche sur un terme, les pages qui se classent au premier rang sont celles qui sont considérées comme étant les mieux documentées et les plus pertinentes par la grande communauté des rédacteurs. "

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Lectures supplémentaires
Conseils aux ado-bloggeurs (via Opossum)
Le spectacle du monde (pour connaître mon point de vue sur ce qui est "sérieux" ou "léger")
Qui Bloggue? Un point de vue de Olivier Ertzscheid
Blogo-marginale? Un commentaire de Miss Tics
Blogging thoughts: personal publication as a research tool (pdf) de Torill Mortensen et Jill Walker
*Mise à jour : voici un exemple de blog de "jeune" de qualité :
Ninou et la quête du Sacré Web (lire son billet : Je suis bloginal à propos de la blogosphère décrite par Mediamétrie

Coup de jeune dans la blogosphère française

Mediametrie sort sa premiere étude sur les blogs: La blogosphère en ébullition (communiqué en pdf et interview video de F.X. Hussherr, en charge de l'Internet chez Médiamétrie, sur le site de Loïc Le Meur.

Voici les chiffres (les données s'entendent pour la France seulement):

- 3/4 des internautes savent ce qu'est un blog (9 sur 10 de 15-24 ans les connaissent.)

- les blogs sont consultés par 3 internautes sur 10, soit 6,7 millions d'internautes, (28% des internautes français.)

- 1/10 des internautes français a déjà créé un blog, soit 2 271 000 internautes (9,3% des internautes français.)

- 82% des bloggeurs français ont moins de 24 ans (35% ont entre 11 et 15 ans)

La plateforme blogue la plus consultée ? Skyblog (avec 17,5% des internautes).

Comme un (jeune) commentateur l'a écrit sur le site de Le Meur: dans le jargon des ados, on dit : "t'as un skyblog?" et non un blog.

Ce qui fait dire à un autre commentateur : "Maintenant qu'ils "savent" ce que c'est, ils pensent tous que j'ai un journal intime en ligne avec un pseudo et que j'y raconte mes vacances..." Alors que son blog en est un corporatif...

Bonne nouvelle?

Olivier Ertzscheid pose le bon diagnostic, appuyé par Miss Tics, en écrivant : "Avec ces chiffres, on est (bien bien) loin d'une blogosphère idéale, relais du débat public, média alternatif et/ou complémentaire, creuset de discours émergents. "

Une autre donnée intéressante de Médiametrie: le nombre moyen de lecteurs par plateforme blog qui donne à Skyblogs, en moyenne, ... 1 lecteur.

Olivier ajoute alors : notez " que pour ce public, le blog n'est donc, en termes de médias, qu'une sorte d'e-mail enrichi (one to one)."

J'écrivais en février dernier que publier un billet sur un blogue pourrait être considéré comme un message à tous. Ou plus précisément un message à qui de droit. On écrit un "courriel" à qui cela peut intéresser, sur un Dazibao numérique.

La culture autobiographique

Olivier se demande "s'il s'agit là d'une spécificité française"...

En Allemagne, selon Der Spigel, 12% des internautes ont un blog mais seulement 4% affirment lire régulièrement un blog (via Crossing the channel.) Ce qui fait dire à certain qu'il y a plus de blogueurs que de lecteurs. La blogosphère allemande, de toute évidence, s'alimente à l'extérieur pour rester en vie...

On compare souvent les blogs à des journaux intimes, dans une tradition catholique de l'autobiographie, en ligne direct avec la Rome antique ("De propria sua vita"), avec un strict mandat de présenter sa vie comme un tout et comme un leg aux générations futures, selon Jill Walker dans son "Mirrors and Shadows: The Digital Aestheticisation of Oneself" (PDF) (page 6).

Les blogueurs aujourd'hui, comme ces "djeunes" de moins de 24 ans qui "skybloguent", écrivent leur coup de gueule, publient leurs photos et, surtout, ils s'écrivent eux-mêmes. Ils ne laissent plus les autres les représenter, selon Jill. Ils prennent contrôle de la représentation de leur propre vie, ce que les masses média contrôlés par les plus de 24 ans n'ont jamais encouragés...

La culture d'échange

Le "knowledge blogging" serait donc restreint à une minorité, (des "vieux" de 24 ans et plus ;-), plus intéressé à exposer leurs idées (à jouer avec l'agenda setting) qu'à gérer leur image- dans- le- monde. Par essence, ces blogs ont une plus grande longévité, mais il faut se demander si le vivier, la blogosphère restante (ces 18% de "vieux" qui bloguent), est suffisamment fertile pour entretenir longtemps le souffle qui anime les blogueurs de la francophonie...

Ça passe, pour la francophonie, par la maîtrise des engins de recherche et des serveurs de notifications dédiés à notre sphère, afin d'accélérer la boucle de rétroaction essentielle à toute échange mais aussi de filtrer adéquatement la qualité des échanges...

Pourquoi les américains de la classe moyenne votent comme les riches?

Dans un pays aussi inégalitaire et divisé socialement que les États-Unis, pourquoi voit-on des présidents de droite, riches et arrogants, contrôler la Maison Blanche et favoriser les riches au détriment des pauvres?

Vu de l'extérieur, il est difficile de comprendre pourquoi ce peuple réélit un président qui ne leur veux pas du bien, économiquement parlant.

Je suis retombé sur un article en faisant le ménage ce soir (ah! il n'y a pas que des inconvénients à faire le ménage). C'est celui de David Brooks, paru dans le New York Times du dimanche 12 janvier 2003 (p.wk15) : Why middle-class Americains vote like rich people.

Je le citais à mon ami Doum depuis quelques années sans me rappeler la source. En relisant je comprends pourquoi j'ai conservé l'article dans mon press-book : ça décille les yeux! De la Démocratie en Amérique, version Tocqueville 2000...

Le top 1 % des plus riches
Le sondage le plus intéressant que l'auteur cite est celui du Time Magazine, accrochez vous : quand on pose la question aux gens s'ils font parti du top 1% des plus riches, 19% répondent affirmatif. Et un autre 20% pensent qu'ils y seront un jour, au courant de leur vie.

J'hallucine.

Donc, si vous êtes vite en arithmétique, dès le départ, on se retrouve avec 40% d'Américains qui ont pensé que quand le parti des démocrates propose de saborder le plan des républicains qui cherche à favoriser le top 1% (avec le estate tax), ils se sentent directement concernés. Trente-neuf pourcent ont tort, pourtant. Mais le vote est comptabilisé dans le mauvais camp.

Le peuple vote selon son aspiration économique
Pas selon leur classe sociale. L'Amérique étant une culture d'abondance, le rêve américain leur fait miroité qu'au-delà de l'horizon, dans la ville d'à coté, dans la prochaine job, l'opportunité sera là, à attendre. Personne n'est pauvre, dit Brooks, tout le monde est "pré-riche".

Les médias (magazine, télé, etc) présentent abondamment ces riches que tous veulent côtoyer un jour. Quand les démocrates parlent de prendre aux riches pour donner aux pauvres, c'est le rêve américain qui est directement touché.

Les différences de revenus n'est pas un enjeu en Amérique
Vivre avec 125 000$ à Manhattan, entouré de ces choses que l'on ne peut pas se payer, ces richesses ostentatoires et inabordables, crée un sentiment de manque perpétuel. Mais la classe moyenne n'est pas dans cette situation, précise Brooks, elle n'est pas constamment sollicitée par des concessionnaires Lexus à chaque coin de rue, ces restaurants hors-prix, et autres chasse-gardés des riches.

La classe moyenne peut se payer tout se qui se trouve au Wal-Mart. Les restos du coin sont à leur niveau. Dans leur milieu, il est même mal vu de se parader avec une jaguar ou d'avoir son cuisinier personnel. Alors ils ne sont pas confrontés avec ces réalités. Ils ne vivent pas ce cruel sentiment de ne pas avoir ce que l'autre semble posséder aisément. Manhattan et ces autres points de contact avec ce top 1 % sont rares. L'américain moyen vit dans des villes normales comme Nashville.

Les Américains admirent les riches
Brooks raconte qu'à Nashville la famille la plus riche, les Frists, est admirée pour son entrepreneurship et son apport à la communauté. S'ils le pouvaient, ils les éliraient au Sénat. Et c'est ce qu'ils ont fait.

Tant que les riches "restent simples", ils sont admirés. Ce que la classe moyenne n'aime pas ce sont ces journalistes, ces académiciens ou l'élite culturelle qui regardent leur culture de haut. Bush Junior peut couper les taxes pour les riches et apparaître le lendemain dans un centre d'achat de banlieue et manger un hamburger au ketchup. Il s'y trouverait comme un poison poisson dans l'eau. Barbara Streisand, qui a dénoncé ces coupures, ne peut pas en dire autant.

Classes sociales, quelles classes sociales?
La raison la plus importante selon Brooks c'est que les Américains ne voient pas la société comme une pyramide à plusieurs étages, avec les riches sur le dessus, la classe-moyenne au centre et les classes laborieuses en dessous. La catégorisation de Marx n'a jamais été transmise jusqu'à eux.

Non, la société américaine, et Brooks donne une belle métaphore, est une énorme cafétéria d'école où les communautés sont assis chacun à leur table. La mienne ici, la leur là-bas. Chaque communauté est convaincu que la sienne est la plus agréable à vivre et que l'autre là-bas, à Manhattan ou à L.A., fait pitié avec tout son argent, sans amis ni de temps à eux.

S'il n'y a pas de classes, il ne peut y avoir de redistribution de la richesse. Il ne faut surtout pas les empêcher de devenir riche...

Liens en vrac (2)

Quand Del.icio.us et bloglines tombent down en même temps, c'est comme si on m'avait retiré la mémoire.

Voici une liste de liens que je cherche à conserver, puisque je ne peux pas les sauver ailleurs:

Daily Motion

On connaissait Flickr, le site de partage, de rangement, de tagging de photos en ligne, voici Daily Motion, la même chose mais pour la vidéo

Daily Motion (Watch, Publish, Share), comme son nom l'indique, est fait par des Français. C'est beau, c'est simple et ça marche. (via MediaTIC)...

Il y a beaucoup de francophones qui y ont téléchargé leurs vidéos (ça fait du bien d'entendre parler français dans des vidéos sur le web) surtout des artistes (en herbe ou non) avec des vidéo-clips maison.

Mes vidéos préférés à voir:
-Septimus avec son rigolo Robert et son sympa Sur la tapis (que je m'écoute en boucle depuis le début de la soirée).
-Mignon: Brosse de Ludo (pour l'accent québécois et la bette du bebé).

Je rêve de voir un tel site décoller et servir de relais à l'actualité où des centaines de gens filmeraient ce qui s'est passé dans leur coin de monde. Un "no-comment" d'Euronews bottom-up en quelque sorte...

(lien vers le blog de Daily Motion)

Les blogs et l'agenda setting

En 1972, McCombs et Shaw ont inventé le terme "agenda setting" pour décrire la fonction des médias de masses qui "exercent un effet considérable sur la formation de l'opinion publique, en attirant l'attention de l'audience sur certains évènements et en négligeant d'autres. L'agenda setting "n'est pas de dire aux gens ce qu'ils doivent penser mais sur quoi ils doivent concentrer leur attention". (source)

Les théoriciens de la communication assumaient alors une coupe franche entre l'état de journaliste et l'état de lecteur.

Cette séparation ne tient plus depuis l'arrivée des blogues.

La nouvelle donne
Une fonction significative du blogue consiste à attirer l'attention de l'audience sur certains sujets et, conséquemment, d'en passer d'autres sous silence . C'est à dire de structurer (même inconsciemment) une hiérarchie des sujets qui crée l'actualité. Par actualité, on peut aussi entendre rendre actuel un sujet même "ancien".

La blogosphère est un percolateur de "sujets d'actualité" .

Dans un article (Agenda setting, opinion leadership, and the world of Web logs) du First Monday (numéro du mois de décembre 2005), Aaron Delwiche (citant Chaffee and Metzger The End of mass Communication? 2001) apporte de l'eau au moulin à cette idée:
“the key problem for agenda-setting theory will change from
- what issues the media tell people to think about
to
-what issues people tell the media they want to think about” .
(source)
Les bloggeurs deviennent une alternative aux sondages d'opinion et permettent de faire monter (bottom-up) des sujets d'intérêt généraux. Dans cette nouvelle écologie de l'information qui se met en place les médias traditionnels peuvent mieux cibler ce qui intéresse leur lectorat...

Liens vers certains de mes billets sur le sujet:
La blogosphère et les médias (13 décembre 2005)
Le blog comme page web avec public (14 mai 2005)
19 millions de blogs recensés (20 octobre 2005)
Se penser comme un filtre (24 mai 2005)
Etre journaliste sur le web (9 juin 2005)
Les nouveaux Gatekeepers (14 août 2005)
Le problème du filtrage de l'information sur Internet (6 août 2005)
La différence entre les blogs et les forums (12 novembre 2005)

La blogosphère et les médias

La blogosphère est une entreprise collective de 20 millions de rédacteurs, de reporters, de chroniqueurs, de critiques et d’éditorialistes, qui travaillent bénévolement. Comment les médias traditionnels peuvent-ils faire face à cette concurrence?

Richard Posner dans un essai, Bad News, publié dans le New York Time le 31 juillet dernier et repris dans le courrier international du 20/26 octobre dernier arrivait à ce constat.

It's as if The Associated Press or Reuters had millions of reporters, many of them experts, all working with no salary for free newspapers that carried no advertising.

La blogosphère comme agence de presse avec des millions de reporters, dont plusieurs experts, donnant gratuitement leur temps et leur connaissance.

Il donne comme exemple l’excellent New York Time comme grande entreprise d’information traditionnelle : un système commercial, hiérarchisé, avec multiples paliers décisionnels, de filtre, de relecture, de révision et de correction entre le rédacteur et l’article imprimé.

Le blogueur n’a qu’à appuyer sur "publier" quand il veut.

Le coût de la crédibilité
Pour conserver sa crédibilité, un grand journal se doit de garantir l’exactitude de ses informations, au risque de retarder la publication de nombreux articles, afin de faire les vérifications nécessaires. La course aux scoops est perdue d’avance. D’autant que cette infrastructure coûte cher et entraîne une dépendance envers les annonceurs et les recettes publicitaires.

Chaque blogueur pris individuellement n’offre pas cette garantie d’exactitude, mais la blogosphère dans son ensemble a mis en place un mécanisme de correction d’erreurs fonctionnant à un rythme implacable. Les billets se lient ensemble et forment un gigantesque filet autour d’une sujet très rapidement. Améliorés par les commentaires laissés par les lecteurs.

L'interdépendance des sphères
Mais la blogosphère ne vit-elle pas au dépend de la sphère des médias, qui elle-même l’abreuve par l’intermédiaire de ses propres portails de nouvelles ?

Il est mal aisé d’y répondre. Je crois qu’il faut plutôt voir la blogosphère comme faisant partie de la sphère des médias. Une nouvelle écologie de l’information se met en place. Et les médias traditionnels se doivent de s’y adapter.

L’article de Posner donne une première piste de réflexion :

"[...] the competition is not entirely fair. The bloggers are parasitical on the conventional media. They copy the news and opinion generated by the conventional media, often at considerable expense, without picking up any of the tab." Les blogueurs pillent les médias traditionnels.

"The degree of parasitism is striking in the case of those blogs that provide their readers with links to newspaper articles. The links enable the audience to read the articles without buying the newspaper.
" Les blogueurs sont des «détourneurs» d'information.

C'est en plein ce que je viens de faire : je cite et link vers un article sans jamais avoir déboursé un sou (ni vous, d'ailleurs)

Free want to be information
"The legitimate gripe of the conventional media is not that bloggers undermine the overall accuracy of news reporting, but that they are free riders who may in the long run undermine the ability of the conventional media to finance the very reporting on which bloggers depend." Les blogueurs scient la branche sur laquelle ils sont assis.

En ce sens, on peut dire que la gratuité tue l'information de qualité. Les médias traditionnels, en général, produisent de l'information de qualité. Malgré tout ce que l'on peut imaginer, 20 millions de blogueurs, ce n'est pas assez pour couvrir l'actualité. Par couvrir, je veux dire être là quand le politicien dit quelque chose, et être là s'il ne veut rien dire aussi (alors qu'il devrait dire quelque chose).

Un journaliste se fait parfois assigner des missions qui ne concordent pas avec ses désirs. À ce jeu, il bat facilement les 20 millions de blogueurs. Le journaliste débusque toujours une nouvelle sur le terrain que personne n'aurait aimé couvrir "bénévolement".

Les parasites
Mais est-ce une raison pour dire que les blogueurs sont des parasites? Oui et non.

Le malentendu cesserait aussitôt si on affirmait une fois pour toutes que les bloggeurs ne sont pas des journalistes. Les blogueurs, au risque de me répéter, sont des chroniqueurs, il forme ce que j'ai appelé dans un autre billet la société des chroniqueurs. Ils véhiculent des narrations bien particulières qui déterminent à la fois ce qui doit être dit et reconnu : un "agenda setting bottom-up" à l'échelle planétaire.

Oui, les blogueurs, comme les chroniqueurs et les éditorialistes des médias traditionnels, sont à la merci des informations de première main. Et cette information, ils la tire principalement des sites web (des journaux), gratuitement.

Non, les blogueurs ne volent pas un lectorat significatif. Ou plutôt, personne n'est en mesure de l'évaluer encore. La baisse du lectorat a débuté fort longtemps avant l'avènement du web ou des blogs. Peut-être même favorisent-ils ainsi la crédibilité d'un journal.

C'est donc bien une nouvelle écologie de l'information qui se met en place. Les journalistes commencent à s'approvisionner via la blogosphère. Les journaux, comme Le Monde, adaptent leur formule pour répondre aux nouveaux besoins. Les médias traditionnels sauront-ils muter?
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Liens de réflexions (mise à jour 14 déc):
Qu'est ce qu'un journaliste? par Loïc Le Meur
La notion de "Journalisme citoyen" sur les blogs par Gaetano sur Expression.be
Bloggers vs. Journalists is Over de Jay Rosen
Un billet n'est pas un article de Francis Pisani
Les blogs, amis ou ennemis du journalisme? sur le site du parlement européen
Débat - Blogs et Journalisme de Luc Fayard (via Aurélien)
Broken Metaphors: Blogging as Liminal Practice (PDF) de Danah Boyd
Are Bloggers Journalists? Wrong Question de Apophenia
Les nouveaux Gatekeepers (mon billet du 14 août 2005)
D'autres liens intéressant à me suggérer?

Projet MyKyoto.org

À Montréal vient de se terminer la 11e conférence annuelle des nations Unies sur les changement climatiques (COP11). Cette conférence a été la plus grande rencontre intergouvernementale depuis Kyoto. 10 000 personnes y ont participé.

La SAT (Société des arts technologiques) propose de voir les jeunes impliqués dans le mouvement tectonique voué à la cause de l'environnement.

Le Projet MyKyoto rassemble des messages audio-vidéo des participants : MyKyoto.org (à ne pas confondre avec MyKyoto.ca qui est un site de spam) est un autre exemple de Pétitions Internet.

On pourrait regretter le fait que le site ne soit pas ouvert à tous, même après l'événement...

Les jeunes, l'info et Internet

Les jeunes de 18 à 24 ans délaissent les médias traditionnels, mais consultent sur Internet, la plupart du temps... des sites de médias traditionnels. La gratuité semble un facteur décisif, que ce soit avec Internet ou les journaux gratuits dans le métro. Contradiction?

C'est ce que rapporte Paul Cauchon du Devoir dans son article : Les jeunes se méfient des médias traditionnels tiré du constat de deux chercheuses de l'INRS, Claire Boily et Madeleine Gauthier qui ont rencontré 70 jeunes de trois villes, Montréal, Toronto et Vancouver (entrevues /focus group pour le compte du Centre d'étude sur les médias et du Consortium canadien de recherche sur les médias.

On nous y rappelle que statistiquement les jeunes de 18 à 24 ans sont moins nombreux à lire les journaux et à regarder la télévision que les autres groupes d'âge et que la gratuité de l'information est un des facteurs qui influencent le plus leur comportement.

"Les auteures de l'étude se sont dites surprises de voir à quel point les jeunes sont méfiants envers les médias traditionnels et de voir à quel point ils critiquaient le manque d'objectivité et la partialité des médias. Cette représentation négative des médias est exacerbée par la concentration de la presse, qui porterait journaux, radios et télévisions à diffuser les mêmes nouvelles partout, selon eux. Ils sont également critiques envers les impératifs commerciaux des médias.".

La fin des médias traditionnels?
J'ai trouvé, dans une autre étude, ce que l'on se doutait un peu, à savoir qu'il semble à tout le moins prématuré de prédire qu’Internet remplacera les médias conventionnels comme source d’information pour le public :
  • 55% des Canadiens ne consultent jamais Internet à cette fin.
  • 75% des francophones disent ne jamais prendre les nouvelles en ligne.

Parmi les gens qui consultent des sources Internet pour s’informer, beaucoup choisissent les sites web des médias conventionnels.
(source : Fiche d’évaluation des médias canadiens du Consortium canadien de recherche)


Donc la question est pourquoi les jeunes, d'un côté, critiquent les nouvelles écrites sur des arbres morts, mais s'emballent quand elles sont véhiculées par des pixels?

Et la réponse serait parce que c'est gratuit. D'ailleurs le scrupule des coupes à blanc pour nourrir l'actualité leur passe par dessus la tête si le journal est gratuit (comme dans le métro).

Une mise en scène du monde dépassée
Je préfère croire que les jeunes ont développé une répulsion face à la manipulation partisane de l'information par les éditeurs de journaux. On connaît tous la manipulation des magnats de la presse dans leur choix de la Une, des titres et chapeaux des articles, de la place des nouvelles dans le journal (ou de leur passage au silence).

On n'a qu'à se rappeller la couverture de la course à la chefferie du Parti Québécois , dans le journal La Presse (notoirement fédéraliste) : leur candidat favori (Boisclair) était à la Une plus souvent que leur candidat honni (Marois).

Pas que La Presse soit devenu pro-indépendance du Québec, loin de là, mais bien parce que Marois était une candidate plus menaçante pour l'unité candienne. En poussant le vedetariat de Boisclair, comme on joue la couverture de Star Académie, on s'assurait d'influencer les membres du Parti Québécois pour choisir le candidat le "plus faible".

Maintenant que Boisclair est élu à la tête du Parti Québécois, on verra plus tard s'il est aussi "faible" qu'on le prétend, mais pour l'instant, outre sa consommation de cocaine, il y a sûrement des cadavres dans le placard qui sont réservés à petit feu pour être servi au moment opportun. La Presse a "gagné" ses élections...

Les jeunes ne sont pas dupes de la mise en scène de l'information. Ils voient ce genre de manipulation. Ce n'est pas l'information qui est de mauvaise qualité, c'est la mise en scène qui est insupportable.

Information want to be free
En accèdant directement au site web du journal, le jeune court-circuite le spectacle du monde organisée par une poignée de manipulateurs : la contrainte de l'espace-page n'existe pas. Une information n'est pas en page 18 ou en Une. Elle a une adresse URL. Accessible directement.

Bien sûr, la possibilité de ne pas mettre l'information existe mais la pression de la concurrence les force à faire eux aussi du dumping d'info à la "all-you-can-eat". Un portail aussi est un filtre, une mise en scène de l'information. Mais si elle ne nous plaît pas, nous sommes toujours à un clic du portail concurrent.

Les jeunes s'intéressent aux questions sociales et politiques. Si on leur offre un accès gratuit, vu leur condition économique, il est normal qu'ils choississent la gratuité.

Consomm-acteur d'info
Le problème vient du fait que la gratuité tue l'information de qualité (qui doit être payant). Ils devront apprendre, en veillissant, à accepter de payer (ce qu'ils seront en mesure de faire) et accepter que l'information, dans les faits, est une extraction subjective du réel. Le problème ne commence pas là, mais bien quand il y a concentration des organes d'informations dans les mains d'un petit groupe.

Au jeu de l'info gratuite, c'est le consommateur final qui se doit de faire le tri et filter. Ça demande du temps. Ça demande des compétences.

Actuellement, la blogosphère est une gigantesque forêt de Sherwood où les Robin des Blogs volent les riches pour donner aux pauvres. Mais en brassant l'information dans tous les sens, on perd le contexte de l'émetteur (et donc la possibilité de connaître son biais).

Paul Cauchon termine en citant Henry Milner, du Collège Vanier, qui demande que l'on trouve les moyens de «faire l'éducation civique sur les médias». J'ajouterais, non pas tant pour devenir "bon- récepteur- qui- sait- décoder", mais bien pour devenir un bon navigateur qui sait comment faire ressortir l'information et surtout comment la valider (via l'identification d'autorités cognitives notamment)...

Les bibliothèques face aux moteurs de recherche Internet

Les moteurs de recherche Internet ont changé la façon dont les bibliothèques (principalement académiques) devront concevoir et programmer leur catalogue. Les utilisateurs possèdent déjà une habitude de recherche que les bibliothécaire doivent tenir compte dorénavant. Les utilisateurs "finaux" sont devenus maintenant des utilisateurs "initiaux".

Olivier Ertzscheid (sur son excellent blogue Affordance) fait ressortir les 5 "révolutions" pour les bibliothèques numériques telles que Dominique Lahary les décrit dans sa présentation "un nouveau paradigme?" (PowerPoint tiré des Actes de la journée du 10 octobre organisée en partenariat avec la Bibliothèque nationale de France : "Bibliothèques numériques : Où en sommes-nous ?")

Les 5 "changements de paradigme"
La recherche dans un catalogue sont dorénavent profondément différent (les titres sont de Dominique Lahary, mais les commentaires sont de moi, à partir de ceux d'Olivier) :

1. "On cherche partout à la fois".
C'est à dire on cherche dans une méta-collection et non plus dans une collection. Des cloisons par format (document audio-visuel, livres, oeuvres d'art) ou par département ne tiennent plus.

2. "On cherche avec ses propres mots"
On utilise le langage naturel au lieu d'utiliser le code des documentaristes, pourtant plus "raisonné".
On préfère rechercher dans des classifications a posteriori (clusterisation, social bookmarking) qu'apprendre une classification a priori (comme le système Dewey)

3. "On veut de l'information primaire"
On préfère se faire offrir tout de suite le contenu plutôt qu'un catalogue de contenu. L'accès au document plutôt qu'une indication d'accès.

4. "On fait tout avec le même outil"
C'est la googlisation de l'interface. Mon accès à l'information ne doit pas être limité à un outil.
C'est aussi le "généralisme au lieu de la spécialisation", "le flou au lieu de la frontière" : la revanche de la recherche de type "définition" au lieu de la recherche savante (cherchez les étoiles ne doit pas retourner un traité d'astro-chimie-nucléaire).

5. "On veut accéder de chez soi, de partout"
Si l'accès se fait par ordinateur, il n'y a plus de raison que l'on ne puisse pas le faire de n'importe où (il est fini le temps de la ligne d'attente derrière le poste de recherche). Pourquoi pas, rajouterais-je, pouvoir chercher dans les rayons à partir de son téléphone portable?...
Le bruit fait peur aux bibliothécaires, pas aux utilisateurs
C'est ainsi que Dominique Lahary finit son exposé.

Il existe un besoin de chercher dans le flou général (sacrilège!). Ce qui est irrémédiable c'est l’interface unique et la possibilité de chercher partout à la fois.

Je préciserais personnellement que par "interface unique", on doit entendre une recherche floue à 1 champ (comme Google) mais aussi une interface API, c'est à dire que les moteurs et les bases s'interconnectent indépendamment. "Pour exister, il faut être indexé par les moteurs" dit Lahary.

Pour les bibliothécaires, le service à offrir ce n'est pas le moteur de recherche, mais la base de données.

Le déplacement de l'autorité
Ce constat est à rapprocher de mes billets sur le même sujet l'an passé (qui découlent de réflexions d'Alexandre Serres et Olivier Ertzscheid) qui nourrissent mon intérêt pour l'autorité cognitive sur Internet.

La place de l'accès à information pour le grand public (tiré de mon billet du 9 septembre 2004) a grandement changé:

1-Autonomie: L'affranchissement des usagers face aux spécialistes (documentalistes / bibliothécaires) (Si le sujet vous intéresse : The Information Industry Revolution: Implications for Librarians )

2-Démultiplication des sources: l'auto-publication augmente la quantité de document disponible (surabondance d'information, avalanche de blogues, etc) (Si le sujet vous intéresse : How much Information?)

3-L'engin de recherche est une commodité: l'outil est devenu en soi un média, nous avons vite oublié que ce n'était pas un outil de tous les jours (Si le sujet vous intéresse : Recherche d’information sur Internet : où en sommes-nous, où allons-nous ? -Alexandre Serres)

4-Apparition du hasard comme facteur de réussite: d'une recherche structurée avec clefs booléen d'antan, on est passé à l'ère où un document se découvre par hasard au détour d'un clic. (Si le sujet vous intéresse : Chercher faux et trouver juste: Serendipité et recherche d'information -Olivier Ertzscheid)

5-Déplacement de la barrière: l'accès à l'information n'est plus un problème, la capacité de traitement de cette information est devenu la nouvelle barrière. (Si le sujet vous intéresse : Problèmes et enjeux de l’évaluation de l’information sur Internet)

6-Déplacement de la l'autorité de validation ("autorité" au sens de "expert en la matière") : les filtres de validation (le libraire, le journaliste, le curé, l'intellectuel, le professeur, le critique) ont été court-circuités et la validation d'un document repose sur l'usager.

Un nouveau rapport à la connaissance s’installe et elle s'exprime par les modes d'accès à l'information.

Différence entre blog et forum

On me pose souvent la question : "Quelle est la différence entre un blog et un forum?"

La nuance significative tourne autour de "l'agenda", ce que les anglophones appellent "l'agenda setting".

Un blog est un espace "personnel" où l'auteur contrôle l'agenda.

Un forum est une place "publique" (ou à accès restreint) où les participants, avec le modérateur, contrôlent l'agenda (dans les limites du thème du forum).
  • Dans un blog, l'auteur est au centre. Dans un forum, le thème est au centre.
  • On lit un blog pour connaître l'opinion d'un auteur. On lit un forum pour connaître le débat entourant un sujet.
  • Dans un blog, l'auteur est l'autorité. Dans un forum, les intervenants sont (théoriquement) à égalité (ou du moins à tour de rôle selon les questions sur la table).
On peut aussi voir le blog comme un forum où le modérateur serait un dictateur qui initierait/orienterait tout le temps la discussion .

On peut voir un forum comme un blog où le micro serait ouvert à tous, en autant que la conversation ne soit pas hors d'ordre...

Ajout 14 nov:
J'ajoute que la différence tient au fait que "l'agenda setting" est tourné vers l'extérieur pour les blogs, et vers l'intérieur pour les forums.

Autrement dit, le blog a une vocation (en général) axée vers la "modification de la perception de la réalité" hors de sa sphère (par exemple en générant des commentaires ou des billets ailleurs sur Internet) alors que le forum limite à son propre espace intérieur l'agenda setting (c'est à dire qu'il faut se "déplacer" à l'intérieur du forum pour être "entendu")

D'autres exemples vous viennent à l'esprit?

PS:
J'ai indiqué ailleurs sur mon blogue la différence d'utilisation entre les blogues, les wikis et les forums. Court mais peut-être utile pour susciter la réflexion...

Liens en vrac

Il faut que ça sorte de ma tête. Mais pas complètement. Pas le temps de commenter davantage. À prendre ou à laisser...

crn.com : Murder Suspect's Google Searches Spotlighted In Trial
Prosecutors claim a Mac specialist on trial in connection with the killing of his wife did a Google search for the words: "neck snap break" and "hold" before she was killed.

Media & Tech : Nouvelle stratégie Microsoft : la vision du "bizuth" Ray Ozzie!
Regard à froid sur la nouvelle stratégie de Microsoft et le web 2.0

Gapingvoid.com : the hughtrain manifesto
We are here to find meaning. We are here to help other people do the same. Everything else is secondary. We humans want to believe in our own species. And we want people, companies and products in our lives that make it easier to do so. That is human nature.

Gapingvoid.com : the stormhoek label design: "why shouldn't a small wine company see apple or google as its competition?"
Une compagnie de vin cherche de nouvelles idées de packaging. L'intérêt du billet se trouve dans son ton et qui applique l'approche Cluetrain/Hughtrain (voir lien précédent), tendance web 2.0. Lisez ensuite la suggestion de Dave Pollard, très brillant, cet homme, vraiment très brillant.

Seth Godin : Who's there : Incomplete guide to blog and the new web (PDF)
Il existe trois type de blogues : les cat-blogs, les boss-blogs et les viral-blogs. Voici des conseils pour les viral-blogs.

L'université de tous les savoirs.
Ces conférences se sont tenues à Paris en 2000. C'est le site de l'intégral des enregistrements. (via Arkandis)

Arkandis : Effet cognitif de l’écriture blog
Ecrire un billet de 3 lignes sur un sujet induit une très bonne mémorisation du sujet traité. Del.icio.us serait donc une mauvaise habitude.

O'reilly : My Blog, My Outboard Brain
Blogging gave my knowledge-grazing direction and reward. Writing a blog entry about a useful and/or interesting subject forces me to extract the salient features of the link

BackPack est un organiseur personnel online qui permet de se laisser des to-do lists.

Jakob Nielsen's Alertbox : Weblog Usability: The Top Ten Design Mistak
1. No Author Biographies
2. No Author Photo
3. Nondescript Posting Titles
4. Links Don't Say Where They Go
5. Classic Hits are Buried
6. The Calendar is the Only Navigation
7. Irregular Publishing Frequency
8. Mixing Topics
9. Forgetting That You Write for Your Future Boss
10. Having a Domain Name Owned by a Weblog Service

Philosopher, c'est nuire à la bêtise. Un blog qui ne respecte pas, justement, les règles d'usabilité de Nielsen. Et on s'en fout car c'est un excellent blog.

Épistémo marketing. Un autre blog qui ne suit pas les règles. Et en plus, j'aime parce qu'il colle épistémologie et marketing dans la même phrase.

Pour un Québec lucide. Le document original.
Pour un Québec solidaire. Le site du manifeste

MS & AP : Distribution vidéo des nouvelles

Tiré du New York Time (via Business Innovations in the Age of Google)

Microsoft and Associated Press to Join in News Video Distribution
said yesterday that it would develop a news video distribution network for The Associated Press and share in advertising revenue generated by the newspapers and broadcasters that use it.

"The combination will enable our advertisers to better reach the huge audience of people who now turn primarily to the Internet for their information,"
Todd Herman (director of MSN advertising and business strategy.)


C'est ce que Ray Ozzie, CTO chez Microsoft, disait...The power of the advertising-supported economic model. Microsoft ne perd pas son temps...

Microsoft et le Web 2.0

Microsoft, lorsqu'il a effectué son virage en 1995-1996 pour affronter le "Internet Tidal Wave" (PDF 444K), en écrasant au passage Netscape, s'est attiré les foudres de toute une génération d'internautes.

Le "satan" a peut-être bien des défauts, mais il lui faut reconnaître deux qualités.

Il a réussi, 1, à se hisser comme un des pionniers du web (du Web 1.0 s'entend). Et il possède, 2, de fameux rédacteurs de mémo!

Le Mémo de Bill Gates, Internet Software Services, parmi les deux qui ont été diffusés hier sur le web (voir ma note), celui-là en particulier, aura le plus d'impact. (Mais, comme je l'écrivais hier, le plus passionnant est celui de Ray Ozzie, le CTO. On en reparlera une autre fois.)

Quand Gates parle, Wall Street écoute.
Et ses employés aussi. Et quand Microsoft bouge, il ne fait pas bon d'être sur son chemin.

Il faut reconnaître que Microsoft a les moyens de ses ambitions. Mais réussira-t-il? Internet sera-t-il meilleur après? Ne va-t-il pas seulement étouffer les nouvelles initiatives, comme ça s'est passé en 1995-1996?

Les paris sont lancés.

On peut se poser des questions, pour se garder les méninges en forme.

Le "coulage" des mémos dans le public est-il intentionnel?
Une bonne partie de la blogosphère américaine le pense. Serait-ce une nouvelle forme (très 2.0 soit dit en passant) de relation aux investisseurs? Je me risque à croire que Microsoft veut réellement entreprendre le virage... Disons qu'ils ont peut-être pris une précaution juridique : en annonçant que MS est en "retard" dans la course, ils se prémunissent contre une éventuelle poursuite anti-trust s'ils dominent de nouveau (dans un web 2.0, personne ne vous force de prendre un logiciel).

Le modèle de publicité est-il viable pour une si énorme entreprise de logiciel?
On ne se débarasse pas d'un modèle (quasi mafieux) de licence de logiciel pour passer à la publicité par mot clef. La cure risque de tuer le patient - ou alors de le changer radicalement.

Est-ce Microsoft est capable de se réinventer?
Actuellement, j'utilise mon PC, je cherche le bouton Windows Start et ouvre mon navigateur Firefox pour aller sur mon serveur de courriel Gmail. Pourquoi pas demain ouvrir mon PC et tomber directement sur Gmail? Ici c'est la métaphore de Desktop qui est en train de disparaître...

Est-ce que Microsoft peut atteindre une distribution rentable sur le web?
Microsoft contrôle son réseau de distribution. Il y doit même sa fortune. Sur le web, il n'y a pas de pression possible pour écarter un concurrent. Il faut tout simplement être le meilleur...

Et sous cet angle, et uniquement sous cet angle, j'y vois un espoir : les produits Microsoft devront être les meilleurs pour dominer et non plus hégémoniquement être adopté, par défaut, de force...

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Poursuivre la réflexion:
Steve Hamm (buziness Week Online), 10 nov: Dueling memos (la réponse de Salesforce.com)
Richard Waters (Financial Times), 9 nov: Visionary for Microsoft’s internet fight-back
Chris Nuttal (Financial Times), 9 nov: Microsoft concern at ‘technology lag’
Charles Cooper (C!Net) : Microsoft's latest call to arms
Source image

L'acte de naissance du web 2.0


Il n'y a plus à douter, la machine de guerre de Microsoft se met en branle. Objectif : le web 2.0. On se rappelle le virage Internet (réussi) de Microsoft il y a quelques années. Nous allons maintenant assister à la conversion du géant vers les services web.

(English version of this post)

Le web 2.0 représente une transition de l'univers isolé des sites web fermés vers des flux de contenu libre et de services ouverts basés sur une plateforme web.

Deux "mémos internes" ont été divulgués sur Internet aujourd'hui (9 novembre). L'un de Bill Gates lui-même, l'autre du chief technology officer, Ray Ozzie. La divulgation des mémos peut sembler louche, mais ils démontrent tout de même tout le sérieux que Microsoft accorde à la réalité du web 2.0 (qu'ils appellent "Internet Software Services"

Et quelles révélations!

Le nouveau champ de bataille de Gates
Monsieur Gates déclare, sur un ton similaire à son mémo qui annonçait le virage Internet en1995 (
"Internet Tidal Wave" - PDF 444K), que : "this coming "services wave" will be very disruptive."

Gates reconnaît que la prochaine vague sera celle des services web : "We will build our strategies around Internet services and we will provide a broad set of service APIs and use them in all of our key applications."

Il affirme, et je n'ai pas de peine à le croire, que la compagnie a les ressources pour harnacher le phénomène et y prendre part rapidement.

Viens ensuite la révélation: "Advertising has emerged as a powerful new means by which to directly and indirectly fund the creation and delivery of software and services along with subscriptions and license fees."

La publicité est reconnue comme un vecteur viable sur Internet! Une reconnaissance quasi explicite que le modèle d'affaire de Google (avec son adSense, la publicité par mot clef) est viable, enviable et l'avenir du logiciel, des services et du contenu.

Ce qui veut aussi dire que c'est sur le modèle d'affaire de Google, son terrain, que Microsoft veut se battre.

J'annonçais le début des hostilité de la plateforme web. Ce mémo est la déclaration de guerre.

Mais cette guerre ne sera pas nécessairement une guerre sale.

L'acte de naissance du web 2.0
Dans le deuxième mémo, celui de Ozzie, beaucoup plus long, beaucoup plus détaillé et de loin le plus intéressant et le plus stimulant - ce mémo là en particulier - c'est l'acte de naissance du web 2.0.

Pas la naissance. L'acte de naissance. La reconnaissance, autrement dit, par l'autorité des autorités, Microsoft, que le phénomène forme une véritable vague de fond.

Le phénomène existe depuis quelques années, évidemment. Mais que Microsoft en parle de cette façon va dessiller les yeux à plus de gens d'affaires que tout ce que la blogosphère au complet aurait réussi dans les cinq dernières années.

Autrement dit, Microsoft vient de rendre crédible cette mouvance, simplement en la nommant.

Les technologies et les pratiques d'affaires que Ozzie identifie deviendront, de facto, la façon de faire des affaires sur le web 2.0.

Dans "The Internet Services Disruption", Ozzie se base sur 3 facteurs-clef :

1. Le modèle économique de la publicité est viable sur le web
La publicité ciblée permet la création et la distribution de services qui n'existaient pas auparavant. Possiblement, la publicité pourrait offrir de meilleurs revenus que les licences...

2. Le modèle de libre-service sur le web est le plus performant
Les produits sont découverts sur le web via une combinaison de blogues, de mots-clefs, de bouche à oreille et de marketing viral. L'effet réseau dépasse toute les armées du service des ventes du monde entier...

3. La demande de service simple, intégré, efficace a atteint un seuil critique
Une kyrielle d'outils nous permet de nous brancher au réseau (PC, Blackberry, portable, jeux vidéo, etc). Même les voitures sont appelées à devenir "intelligente" et "branchée". L'offre pour des outils simples et interopérables sera essentielle...

"Products must now embrace a “discover, learn, try, buy, recommend” cycle – sometimes with one of those phases being free, another ad-supported, and yet another being subscription-based."

Complexity kills, rajoute-t-il. La complexité étouffe. Il faut développer léger et réduire la complexité. (Provenant du créateur de Lotus Note, la plateforme préhistorique qui brime la productivité de milliers d'employés à travers le monde en les enfermant dans une architecture arriérée et propriétaire, il y a de quoi surprendre. Mais au moins il voit clair maintenant.)

Et lui aussi apporte une révélation: "We will design and license Windows and our internet-based services as separate products, so customers can choose Windows with or without Microsoft’s services."

Oui, vous avez bien lu. Les services de Microsoft seront modulaires et interopérables avec d'autres services.

Il répète encore si vous n'avez pas compris: " We’ll design and license Windows and our services on terms that provide third parties with the same ability to benefit from the Windows platform that Microsoft’s services enjoy."

J'insiste, lisez bien encore :"Our services innovations will include tight integration with the Windows client via documented interfaces, so that competing services can plug into Windows in the same manner as Microsoft’s services. "

Ça, c'est la fin définitive du web 1.0...

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Références
Source des mémos "divulgués" : Scripting News de
Dave Winer
Mémo de Bill Gates : Internet Software Services
Mémo de Ray Ozzie : The Internet Services Disruption
Financial Times : The Microsoft memos revealed
Tim O'Reilly : What Is Web 2.0 (Design Patterns and Business Models for the Next Generation of Software)
Nicolas Carr : The amorality of Web 2.0 (longue note lucide pour empêcher de tourner en rond)
News.com : Gates telegraphs Microsoft's software services
News.com : Microsoft to reorg; Allchin to retire
NY Times : Internet Services Crucial, Microsoft Memos Say
Web 2.0 (article du wikipedia)
Source de l'image.
Ajouts du 12 nov:
Media & Tech : Bill Gates annonce la révolution des services logiciels (un des rares commentaires éclairés dans la blogosphère francophone)
Media & Tech : Nouvelle stratégie Microsoft : la vision du "bizuth" Ray Ozzie!

La valeur de votre blog


Mon blog vaut $24,275.22.
Et le vôtre?


Petit outil développé par Dane Carlson afin de donner une "valeur" à votre blog.

C'est en dollar américain, c'est basé sur le ranking dans technorati, c'est une alternative au PageRank de Google. C'est rigolo, à coup sûr, car on peut se mesurer...

(Mais ce n'est surtout pas l'argent que vous allez toucher, n'allez pas croire. La valeur que vous créez sur le web, ce sont les engins de recherche qui la récoltent...)

Windows Live

Microsoft vient d'annoncer qu'il offrira des versions en ligne de Windows et de Office. (source)

Un pas de plus dans l'instauration d'une plateforme qui utilise le web comme système d'opération. (J' avais glissé un mot sur le WebOS).

Notez la date. Que Microsoft fasse ce pas signifie que la guerre de la plateforme web est commencée...

L'enjeu? Le contrôle des futurs "postes internet" bas de gamme (vous allez voir, vous aussi vous en aurez assez de payer des centaines de dollars tous les 3 ans pour un nouvel ordinateur...).

Mise à jour (11 nov) ;
Avec les infos qui sont sortis peu de temps après, je crois que je me dois de dire que l'enjeu dépasse largement les "postes internet" pour englober TOUS les accès accès internet (cell, portable, iPod, auto, etc)

Qui croire quand informations et connaissances circulent librement ?

Knowledge Management et Autorité Cognitive

Depuis ses débuts, la réalité du Knowledge Management a été celle de la mise en place de dispositifs organisationnels, de systèmes de gestion, de logiciels collaboratifs, d'outils de capture, de dispositifs de filtre afin de partager la mémoire de l'entreprise en surmontant un certain nombre de barrières concrètes comme les suivantes :

- Mauvais système de communication (verrou logistique),
- Distribution déficiente de l'information (verrou de communication),
- Rétention de l'information (verrou humain),
- Mauvaise gestion des ressources (verrou de management).

Une fois ces verrous sautés, l'information et les connaissances circulent et créent parfois de véritables raz-de-marée. On discute souvent de la technologie ou du type de management à adopter, mais on s'interroge rarement sur le rapport de l'usager face à un accès libre à la connaissance.

En fait, que sait-on des capacités d’un collaborateur à traiter une telle quantité d'informations et de connaissances ? Faut-il le rappeler, accéder à autant d'informations comme actuellement est sans précédent dans les organisations.

Dans ce contexte, la question à se poser n'est plus de savoir comment organiser et mettre en œuvre la capitalisation des connaissances, mais plutôt de déterminer comment le collaborateur arrive à décider de ce qu’il est important de connaître dans l’ensemble des connaissances disponibles.

Alors entre en jeu ce que l’on appelle l'autorité cognitive.

L’autorité cognitive

Il est nécessaire de préciser ce concept de manière formelle :

Une personne A est une autorité cognitive pour une personne B dans un domaine d’intérêt donné lorsque ce qu’exprime A possède plus de poids pour B que toutes autres assertions existantes sur le sujet. [Wilson, 1983]

Si nous devions ne dépendre que de nos propres connaissances personnelles, nous serions sérieusement limités. En fait, nous dépendons des autres pour la majorité de nos idées et connaissances. Avec les informations que les autres nous rapportent nous construisons une vision du monde qui nous permet d'agir.

Il est normal que nous nous tournions vers l'autre quand nous avons une question. Il faut donc reconnaître que s'effectue alors le choix de la meilleure personne apte à nous répondre, l’autorité cognitive.

Une autorité cognitive n'est pas une autorité administrative car elle ne s'acquiert pas par élection ou par la force. Une autorité cognitive est une personne qui influence notre manière de voir. On peut influencer la pensée de quelqu'un par un ordre, par une publicité… mais cette influence ne peut être reconnue comme une influence aussi légitime que celle d'une autorité cognitive: on décide volontairement de croire en cette dernière. Cette volonté de croire s'étend aussi au document qu'elle écrit, au système qu'elle met en œuvre, au groupe ou à l'institution à laquelle elle adhère.

L'autorité cognitive est clairement une source de crédibilité. Toute base de connaissances ou communauté de pratique recherche ce type de crédibilité. La crédibilité est un facteur important pour déterminer la pertinence d'une information ou d’une connaissance.

Les questions que se pose le plus communément un collaborateur à la recherche d’une information ou d’une connaissance sont : "Est-ce que la source que je viens de trouver répond à ma question ? Dois-je chercher encore ?".

A ce niveau, il faut distinguer entre les questions closes et les questions en suspens.

Les questions closes sont celles que l'on considère, de façon pratique, comme ayant reçue une réponse définitive, sans l'ombre d'un doute. Ce sont les croyances habituelles de l'entreprise sur sa vocation, son positionnement sur le marché, ses concurrents… Elles peuvent évoluer, mais au moment de l'évaluation de l'information, la question ne se pose pas. On s'attend alors à ce que notre autorité cognitive soit en mesure de confirmer cette pertinence lorsqu'elle nous répond.

Les questions en suspens sont les plus difficiles, mais les plus intéressantes. Par construction, il existe de multiples réponses aux questions en suspens. Aucune ne domine les autres, sinon nous ferions face à une question close. Quelle est la meilleure réponse ? Quelle est la plus pertinente ? Y a-t-il d'autres réponses ? Qui croire ?

Telles sont les questions que se pose le collaborateur. Bien entendu, différentes personnes arriveront à différentes réponses à ces questions.

Dans les deux cas, pour des questions qui sortent de sa sphère de compétence, le collaborateur s'en remet à une autorité cognitive parce que celle-ci possède un savoir accumulé (réponses aux questions closes) ou une opinion éclairée (réponses aux questions en suspens).

Mais si le collaborateur ne possède pas de connaissance dans une sphère donnée, comment s'opère le choix d'une autorité cognitive dans ce domaine ?

On identifie communément un expert par sa réputation, sa fonction, son titre, sa formation, ses performances antérieures ou bien par recommandation.

La réputation n'est pas une garantie de compétence, mais c'est un filtre que l'on retrouve partout dans la vie sociale et elle s'applique aussi bien à l'entreprise.

Les succès antérieurs permettent de s'affranchir de la réputation pour se donner une idée indépendante de la compétence d'un expert. Cependant, nous ne sommes toujours pas plus avancés, car pour juger d'un succès dans une sphère qui n'est pas la nôtre il faut des connaissances qui nous font justement défaut.

Par contre, si l'expert possède dans son curriculum une réussite extraordinaire, surtout si ses pairs le donnaient perdant a priori comme : décrocher un contrat crucial, réorganiser une gamme de produits condamnée, découvrir une invention révolutionnaire… nous avons une façon de vérifier l'exploit extraordinaire et de tomber d'accord avec le verdict : "il doit être un expert pour avoir réussi ce coup..."

Comme la réputation est basée sur la performance, mais pas exclusivement, on pourrait s'attendre à ce que l'évaluation des succès soit la meilleure méthode pour identifier si une personne est une autorité cognitive pour ce domaine. Mais cette méthode est malheureusement ardue car les cas extraordinaires ne sont pas légions…

Dans les faits, se fier à la réputation reste la voie la plus fréquemment empruntée. Il faut noter qu’avec une telle approche on peut tomber dans des effets de mode ou de rapports de force politique dans l'organisation.

Une autre voie pour identifier un expert est la pertinence intrinsèque du texte ou du discours de la personne.

Un document, une communauté ou une personne peut acquérir une autorité cognitive auprès de collaborateurs par la plausibilité et la cohérence de leurs propos. Autrement dit, un texte clair, bien écrit, simple à comprendre peut paraître la réponse plausible à la question posée.

Il faut indiquer cependant que nos propres croyances antérieures limitent ce que nous accepterons comme nouvelles croyances, même si elles nous guident dans l'acceptation de nouvelles connaissances. Exprimé autrement, l'intelligence d'un texte ne relève pas nécessairement de son intelligibilité et dépend clairement de celui du lecteur.

Les impacts pour le Knowledge Management

Partout où l'information et les connaissances circulent librement, le problème du filtrage personnel commence. L'usager, en dehors de sa sphère de compétence, passera inévitablement par une autorité cognitive pour sélectionner comme pertinente une connaissance.

Dans ces conditions, l'idéal pour un Knowledge Manager est que son dispositif soit perçu comme une autorité cognitive, ou plutôt que toutes les sources et ressources qui s'y trouvent le soient en tous temps et en tous domaines. Ce qui n’est pas aisé…

De fait, de nouvelles barrières apparaissent, il s’agit de :

- Filtrage non expert des communications,
- Redistribution erronée de la mauvaise information,
- Mauvaise interprétation ou recoupement de l'information,
- Gestion déficiente ou utilisation partielle des ressources internes.

Il s’agit maintenant de barrières cognitives.

C’est pourquoi, le Knowledge Manager doit pouvoir identifier pratiquement de quelle façon certaines personnes ont obtenu la confiance des collaborateurs dans certains domaines critiques, vérifier qu’il s’agit des bonnes personnes et agir sinon. Il s’agit de ne rien laisser au hasard et de ne pas avoir peur d’intervenir pour : défaire ou créer des réputations, développer le faire savoir et assurer le transfert de confiance.

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Ce texte a été écrit pour le bulletin de nouvelle #16 de Knowledge Consult
Je remercie Denis Meignan pour son aide à la réécriture l'édition.

Référence :
Patrick Wilson, Second-Hand Knowledge : An Inquiry into Cognitive Authority

Blogues : Universitaires à risque?

Dans un article de JP Cloutier, sous le même titre, un certain ressac contre les universitaires qui "bloguent" semble se faire sentir. "Le fait de publier un blogue pourrait-il nuire à l’avancement ou à la titularisation d’un professeur universitaire?" demande Cloutier.

Il cite le cas de Daniel Drezner, professeur adjoint de science politique à l’Université de Chicago, qui s'est vu refuser sa titularisation tout récemment. Parce qu'il blogguait? Son article, fort intéressant, passe en revue divers point de vue.

Dans un billet sur le sujet, Ytsejamer, trouve que c'est l'illustration de la turbulence que le bouillon de culture créé par la blogosphère induit dans le monde académique. " "Internet rend poreuses les frontières des communautés de pratique "écrit-il. Il est inutile pour le monde académique de l'ignorer.

Pour moi, il me semble que l'on revit ici le sempiternel drame de l'universitaire qui fricotte avec la culture de masse. Un universitaire qui écrit un roman? Pas sérieux, ça! Un universitaire qui écrit dans une revue ou journal du peuple? ridicule! Il passe à la télé? honte sur lui!

Umberto Eco a pourtant tout fait ça.

Je crois qu'il aura inévitablement un ressac contre la montée des blogs. La blogosphère est un vivier de théories profanes. Peut-être que pour un temps, certains membres de la sphère académique tenteront de créer un programme d'endiguement pour consolider leurs acquis.

Mais la coexistence de ces sphères de connaissance du monde, d'ors et déjà, relève d'une implacable logique : il y aura un développement fulgurant du savoir profane en parallèle du savoir académique.

Les mauvais points
Qu'il y ait des frictions, c'est inévitable. Peut-être même cela évitera certains excès. Le blog Freiheit und Wissen liste 4 raisons pertinentes pour critiquer l'usage académique d'un blog :
  1. bloguer occupe une tranche horaire qui pourrait être utiliser à de la recherche;

  2. bloguer ne comporte pas le même niveau de rigueur intellectuelle;

  3. bloguer sur des sujets (politique entre autres) qui ne sont pas en lien avec votre recherche peut indisposer vos collègues;

  4. bloguer alimente la blogosphère et non le réseau académique - ou du moins s'il le fait, ce sera de façon légère.
Évidemment, il faudrait être borné pour s'en tenir à ces points.

Les bons points
Voici les points positifs que l'on peut y voir (toujours selon Freiheit et Wissen):
  1. bloguer permet d'essayer ou de tester ses idées;

  2. bloguer permet d'avoir un feedback immédiat d'un audience assez large;

  3. bloguer sur des sujet académique permet un lien entre le monde académique et les profanes sur des sujet d'intérêt commun (une forme de vulgarisation);

  4. bloguer est une façon de poursuivre la conversation en dehors des cours ou des forums (c'est d'ailleurs une utilisation que l'outil permet de faire très facilement).

Patrick Giroux semble ajouter un point supplémentaire : bloguer pour se donner le goût d'écrire. Mais par mesure de précaution contre les 4 premiers points négatifs, étant lui-même du milieu académique il s'est senti obligé de poster ses raisons sur son blog. (Il rédige son premier dossier d’évaluation et il aimerait bien avoir un second contrat et obtenir un jour la permanence).

Tous à risque?
Mais le milieu académique n'est pas le seul à subir ces pressions (réels ou imaginaires), le monde professionnel aussi.

Jean Lalonde a arrêté son célèbre blog sur Amélioaction parce qu'il s'est trouvé un emploi (il était conseiller avant). Il n'y a pourtant pas de lien de cause à effet. Est-ce par manque de temps (point 1 négatif) ou par conflit avec son employeur (point 3 négatif)?

Peut-être que, tout simplement, le réseautage avec son auditoire n'était plus aussi important...

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Poursuivre la réflexion:
Thoughts on the Anti-Blogging Movement
Bloggers Need Not Apply
Peer Review, Small Audiences, and The Incredible Shrinking Guilds
Metablogging: When Academics Blog
Blogging Prof Fails To Heed His Own Advice